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CHANTS REVOLUTIONNAIRES

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7 août 2013 3 07 /08 /août /2013 14:16

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             La quatrième rencontre du « Forum de la Gauche arabe »

    La quatrième rencontre du « Forum de la Gauche arabe » s’est tenue à Beyrouth, les 7 et 8 juin 2013, à l’invitation du Parti Communiste libanais.

Des représentants de 24 partis de 11 pays arabes ont participé à cette réunion. Ils ont discuté de la situation de la région à la lumière de la confrontation populaire qui se poursuit avec les projets impérialistes-sionistes et l’immixtion impérialiste dans les affaires intérieures de plusieurs pays arabes, mais aussi de la confrontation avec les régimes dictatoriaux et les forces contre-révolutionnaires, dont, en particulier, les forces politiques religieuses qui tentent d’encercler les soulèvements et les révolutions, après avoir pris le pouvoir dans certains pays arabes où elles pratiquent les pires formes de répressions et de dictatures. Ils ont, enfin, affirmé que la lutte se poursuit afin de défendre l’Etat civil, démocratique et moderne ainsi que les droits citoyens.Les représentants des 24 partis se sont arrêtés, plus particulièrement, sur la situation très tendue en Syrie ainsi que sur le projet présenté par la réaction arabe sous le titre « l’échange des territoires » en Palestine occupée. Ils ont aussi étudié la situation qui prévaut en Irak, au Liban, en Egypte, au Soudan et dans les deux régions du Maghreb et de l’Orient arabes, à la lumière de la lutte contre les régimes rétrogrades en place et le projet du « Nouveau Moyen Orient ».

Ce projet qui vise l’émiettement du Monde arabe en mini-Etats religieux, confessionnels et ethniques qui se font la guerre, facilitant ainsi la mainmise des puissances impérialistes sur les richesses, anciennes ou nouvellement découvertes, que recèlent les pays arabes, mais aussi les voies de distribution de l’énergie dans le monde… croyant pouvoir, par là, reprendre leur mainmise sur la planète afin de résoudre leur crise structurelle et pérenniser leur régime capitaliste branlant.

A partir de ce qui précède, le quatrième « Forum de la gauche arabe » est arrivé aux conclusions suivantes :

1 – Le Forum de la gauche arabe trouve que la lutte contre le complot impérialiste-sioniste, basé sur l’appui des forces de la réaction arabe et d’autres forces régionales et qui vise l’unité de la Syrie et des changements notoires dans la carte de la région de manière à mieux servir les intérêts capitalistes, ne peut se faire ni à travers des solutions militaires, ni en internationalisant le conflit. La meilleure solution étant celle du dialogue intérieur qui mettrait fin au bain de sang, tout en regroupant les forces démocratiques qui, dès les premiers jours de la crise, avaient appelé à lutter contre l’intervention étrangère et le projet d’émiettement confessionnel, mais aussi contre les politiques économiques néolibérales et pour la création des bases du changement démocratique à tous les niveaux.

2 – Il réaffirme la position des partis la gauche arabe concernant la Cause palestinienne, qu’ils considèrent comme un point central dans leur stratégie. En effet, le nouveau projet dit « de l’échange des territoires » constitue une nouvelle étape très dangereuse, tout aussi dangereuse que l’Accord d’Oslo, puisqu’elle vise à consacrer Israël en tant que « Etat des juifs du monde ».
De plus, et tout en appréciant l’acceptation de la Palestine en tant que membre observateur aux Nations Unies, le Forum de la gauche arabe a mis l’accent sur le droit du peuple palestinien à l’autodétermination, au retour et à un Etat national souverain ayant Al Quds pour capitale. Il a aussi appelé à la création d’un mouvement de résistance palestino-arabe dans le but de libérer, par tous les moyens, les territoires occupés. Il a, enfin, adressé un salut spécial aux détenus palestiniens et arabes dans les prisons israéliennes, aux héros de la « grève de la faim », leur promettant de poursuivre les actions visant à leur libération.

3 – Il affirme sa totale solidarité avec les forces de gauche et le mouvement populaire libanais qui doivent, aujourd’hui, faire face à de nouveaux dangers provenant des répercussions de la crise syrienne sur l’exacerbation des tensions confessionnelles. Et, tout en mettant en garde contre un possible retour de la sédition qui pourrait profiter à Israël, il voit dans l’appel des forces démocratiques libanaises à consolider la paix civile et à quitter la politique de « neutralité » passive du gouvernement un point de départ pouvant empêcher le Liban de glisser à nouveau vers la guerre civile.

4 – Il affirme aussi sa solidarité avec les forces de la gauche et de la démocratie en Irak dans le but de mettre fin au régime des quotas confessionnels et ethniques, Il dénonce le terrorisme et les immixtions étrangères qui nourrissent les tentatives d’émiettement de l’Irak et appelle à compléter la souveraineté patriotique par la création de l’Etat civil démocratique.

5 – Il s’incline devant les martyrs des soulèvements et des révolutions arabes, en particulier le leader tunisien Choukry Beleid. Il se félicite des efforts visant à unifier les forces progressistes tunisiennes dans un large front démocratique afin de pouvoir faire face à violence, au terrorisme, et de réaliser les objectifs de la Révolution de la dignité et de la liberté.

6 – Il affirme sa solidarité avec la révolution du peuple égyptien et son appui aux forces populaires qui font face aux politiques des « Frères musulmans ». Il appelle, dans ce sens, toutes les forces arabes de libération à organiser, le 30 juin, des actions de solidarité avec les partis et forces politiques démocratiques, les mouvements de protestation et le mouvement « Tamarod » (Révolte) qui appellent à en finir avec « le pouvoir des « frères musulmans » et à récupérer la révolution.

7 – Il salue tous les mouvements populaires dans le golfe arabique, plus précisément au Bahreïn, Kuweit, Yémen et en Arabie Saoudite, et les assure de sa solidarité agissante face aux exactions des régimes répressifs, aux arrestations et aux immixtions étrangères sous toutes leurs formes, et pour la réalisation des programmes qu’elles soutiennent dans le but d’en finir avec le sous-développement et la dépendance. De plus, il appuie le mouvement populaire jordanien qui milite sous la direction des forces politiques démocratiques afin d’effectuer le changement politique radical auquel il aspire, de poursuivre les réformes politiques nécessaires et d’empêcher l’adhésion de la Jordanie aux pôles régionaux hostiles aux aspirations des peuples arabes.

8 – Il se déclare solidaire avec la lutte du peuple soudanais et de ses forces démocratiques pour mettre un terme aux politiques de division et de répression pratiquées par le pouvoir. Il se déclare également solidaire avec les forces de la gauche en Algérie, dans leur combat pour le progrès social, et au Maroc afin de réaliser le projet de modernisation démocratique.

9 – Le Forum de la gauche arabe voit, enfin, que la lutte menée par la gauche et les forces démocratiques dans le monde arabe contre l’impérialisme et la bourgeoisie (y compris les forces politiques islamistes) confirme le fait que le changement démocratique dans nos pays ne peut se faire que par l’intermédiaire des forces populaires. Parce que ces forces sont les seules à avoir un intérêt véritable dans la lutte contre les régimes basés sur la répression, la corruption et la dépendance, pour instaurer d’autres démocratiques qui pourraient réaliser la justice, l’égalité et l’indépendance nationale.

A partir de cette vision, les représentants des partis présents au « Quatrième Forum de la Gauche arabe » se sont entendus sur la nécessité de mettre au point un programme stratégique commun qui unirait les tâches de la lutte pour la démocratie et l’égalité à celles concernant la libération nationale de l’impérialisme, la liquidation des bases militaires étrangères et la résiliation des accords allant à l’encontre de la souveraineté des pays arabes. Sur ces bases, les représentants des partis ont décidé de donner un nouvel élan au « Forum de la Gauche arabe »  et ils se sont mis d’accord sur une commission de suivi pour diriger ses actions. Ils ont décidé également de pousser plus avant la coordination avec les autres forces de libération et progressistes arabes et internationales et de développer le rôle des organisations syndicales, de celles militant parmi les jeunes et les femmes  afin de regrouper tous ceux et toutes celles qui sont lésés par les régimes de dépendance et les politiques socio-économiques que la bourgeoisie arabe poursuit, quel que soit l’habit sous lequel elle se cache.

 

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7 août 2013 3 07 /08 /août /2013 13:35

 

marxcheani.gifComment expliquer les succès électoraux de l’extrême droite ?

 

 

 

                                   gilles questiaux

 

 

A l’heure où de nombreux électeurs « de gauche », en fait socialistes, n’hésitent plus à voter FN au second tour d’une partielle, et où abstention et vote nul, dans un climat de fort mécontentement, atteignent 60 ou 70%, posons-nous la question : qu’est ce qui éloigne des urnes l’électorat populaire, ou le pousse dans les bras du FN, dont la nature profonde est antisociale, ce dont ces électeurs, dans le fond se doutent bien. Et pourquoi fuient-ils le front de Gauche, malgré les efforts médiatiques de son principal porte-parole pour jouer au « bad boy » ?

Il me semble que le vote FN, quand il va au-delà de l’électorat traditionnaliste conservateur et raciste, n’est paradoxalement que la forme la plus naïvement « civique », parce qu’elle vote encore, d’un rejet total de la classe politique, « classe » qui n’est pas autre chose que le parti multiforme et redondant de la bourgeoisie dans ce pays, et dans toute l’UE d’ailleurs. Quant à ceux qui ne votent pas, ils sont devenus des adversaires de la démocratie entendue au sens libéral, comme un système dont l’unique finalité est de légitimer des dominations oligarchiques.
Le vote FN est comme toujours mal inspiré : il n’est au fond que le vote indiqué par les médias et les politiques à ceux qui sont mécontents des médias et des politiques. Il est illusoire et naïf de penser que de nouveaux cadres dépourvu de tendances fascistes vont affluer dans ce parti avec sa croissance électorale, en prenant au premier degré son discours récupérateur des thèmes de la gauche ouvrière. Ce parti n’est que la maison de la famille le Pen, qui est bien gardée.

Mais ce vote ne se porterait pas précisément sur ce parti s’il n’avait pas su intelligemment tromper son monde en reprenant des thèmes et des demandes laissées en déshérence par la gauche et plus particulièrement le PCF. Les principaux fautifs de la monté du FN, c'est nous.
- Critiques de l’UE et de ses empiètement sur la souveraineté nationale (et il n’y a pas de démocratie sans nation pour en servir de cadre).
- Critique des délocalisations, affirmation du « produisons français ».
- Insécurité : depuis une génération ce parti se présente comme le défenseur des classes populaires qui en sont les victimes désignées. Et la dénégation aveugle de ce problème de la part de la gauche et surtout de la gauche de la gauche n’a pas peu contribué à son déclin.
- Le FN est devenu le seul parti de masse à protester contre les aventures impérialistes et criminelles de la France de Sarkollande en Libye et en Syrie. Pour de mauvaises raisons sans doute. Mais ce sont les seuls.
- Enfin, la critique de l’immigration devenue taboue à gauche et dont il faut dire deux mots.

En 1975, le racisme était beaucoup plus répandu, et pourtant les gens ne votaient pas pour les partis racistes.

Le thème de l’immigration n’avait que peu de prise sur l’électorat populaire de gauche, quelques fussent les préjugés qui pouvaient y régner, tant qu’il était tenu pour acquis qu’elle avait vocation à l’intégration massive à la société française et au peuple de France. Ceux qui penchaient pour l’extrême droite étaient les Français les plus bornés qui refusaient cette intégration annoncée de millions de nouveaux Français, notamment noirs et /ou musulmans.
Depuis qu’il apparait à la suite de facteurs objectifs (chômage de masse) et subjectifs (développement dans l’immigration et dans la deuxième génération des idéologies communautaristes et religieuses) que cette intégration est en panne, ou tout au moins se trouve traversée de difficultés inattendues et considérables, une nouvelle xénophobie populaire est apparue dont la base n’est pas traditionnaliste, catholique et raciste, mais républicaine et laïque.

A tort ou à raison, de nombreux français redoutent une islamisation rampante du pays et choisissent le vote FN pour s’y opposer. Cette islamisation a peu de chance de se produire, mais après tout c’est le but affiché des groupes islamistes radicaux qui semblent ne reculer devant rien dans la poursuite de leurs objectifs irrationnels et qu’il faut donc bien combattre. Or la gauche de la gauche, sur ce point, met résolument sa tête dans le sable.

Établir une plate-forme populaire susceptible de contrer le populisme d’extrême droite

Il n’y pas d’alternative à une plate forme qui reprenne à ce programme populiste ce qui est légitime, et qui ne sert dans le discours de propagande qu’à faire passer le reste du programme implicite mais inchangé du FN : racisme, anticommunisme, réaction antidémocratique et antisociale.

Sur la nation :
Une campagne résolue pour sortir de l’euro de l’UE et de l’OTAN qui limitent déjà la souveraineté nationale et mettent en danger son avenir à brève échéance.

Sur la sécurité :
Renoncer au tabou de la répression, et construire un projet ambitieux et cohérent qui prenne le problème au sérieux, s'attaque à ses racines, en l’articulant avec l’éducatif, et rompre avec la vulgate angéliste sur cette question, d’origine gauchiste et bourdieusienne.

Sur les questions de mœurs et de droits des minorités :
Revenir à une neutralité conduisant à les dépolitiser. A rebours du foucaldisme, dépolitiser la sexualité et ses manifestations sociales.

(Ouvront une parenthèse : on doit reconnaître qu'avec l’élection d’un politicien noir banal impérialiste et décevant à la tête des États-Unis, s'est produite la fin symbolique de la violence symbolique raciste. Comme Thatcher avait signalé la fin de la misogynie institutionnelle en Occident, bien malgré elle. Le cycle des réformes sociétales post 68 est je pense pour l’essentiel achevé, au moins dans un pays comme la France, et il n’y a plus beaucoup à gagner comme avancées légales sur les questions de sociétés (antiracisme, féminisme, libération sexuelle). Le vrai moyen d’améliorer la condition des femmes, des Noirs, des musulmans en France maintenant, c’est de revenir sur la liquidation de services publics, de restaurer la sécurité sociale, et de supprimer le chômage, qui frappe en premier ces groupes qui effectivement n’héritent guère de capital. Le vrai moyen de supprimer l’homophobie et l’antisémitisme, ce n’est pas la promotion du droit à la différence qui peut être interprété comme la revendication de privilèges, mais la création des conditions sociales du droit à l’indifférence.)

Sur la laïcité :
Soutenir concrètement les mesures légales qui interdisent la prolifération de pratiques religieuses souvent dégradantes qui renforcent le communautarisme, et choquent les usages populaires français, ce qui développe le fascisme autochtone en réaction. Chaque Burqa qui circule apporte des milliers de voix au FN, et la tolérance gauchiste pour ce symbole obscurantiste est … intolérable !
Interdire le financement des cultes par l'étranger, concrètement par les pétromonarchies du Golfe et par les États-Unis.
Réprimer résolument les courants politico-religieux qui cherchent à communautariser l’immigration, et qui propagent le terrorisme. Ce n’est pas parce que ces courants sont stigmatisés par les médias dominants qu’ils sont bons.

Sur l’immigration :
Reconnaître qu’elle est encouragée par le MEDEF pour diviser la classe ouvrière et faire pression à la baisse sur les salaires, et en conséquence proposer un ralentissement de son rythme pour relâcher cette pression, permettre le développement des pays de départ, et l’intégration des immigrés déjà présents et de leurs enfants. Ce qui suppose de lutter contre l’immigration illégale, en commençant par réprimer impitoyablement les employeurs, les entreprises comme les particuliers, les donneurs d’ordre qui profitent de la situation (comme la Mairie de Paris, qui a fait construire le tram T3 par des sans-papiers!), les mafias, mais aussi en renonçant à la régularisation systématique des clandestins qui encourage les migrations dans les pires conditions. Il ne devrait pas être difficile de mettre sur pied des critères à la fois justes et restrictifs. Mais ils ne seront guère utilisés, car l'immigration s'arrête net quand l'offre d'emploi cesse, comme on a pu le constater en 2009 avec la crise économique.

Souveraineté :
Renouer avec l’indépendance politique et économique de la France. Sur l’Europe, proposer la sortie de la France, le retour au franc, et la constitution de nouvelles alliances avec les BRICS et les autres pays sans exclusive, renouer avec une politique d'amitié avec le monde arabe et l'Afrique et le monde émergent. Quitter l'OTAN qui soumet l’armée au contrôle étranger.

Produire en France :
Réindustrialiser, réorienter l’économie vers la production de biens utiles consommés sur place. Ce qui impliquerait aussi une politique de retour massif de la puissance publique dans l’économie, incompatible avec le discours antifiscal du FN.

Ce qui conduit à rendre à l’État ses prérogatives économiques :
Renationaliser pour les restaurer les services publics et les mettre au service de tous. Nationaliser les banques et confier les groupes médiatiques à leurs salariés pour désarmer l’oligarchie.

La nouvelle ère est celle de la lutte pour la décolonisation universelle, de l’émancipation des nations contre le capitalisme anglo-saxon et transnational, une lutte sociale et patriotique où tous peuvent se retrouver, quelque soient la religion, la couleur de peau, le sexe, l'orientation sexuelle. Le patriotisme a le vent en poupe. Il ne faut pas le laisser au FN, héritier lointain de toutes les trahisons nationales, de Coblence à Versailles, de la collaboration à l'OAS.
Les luttes « sociétales » qui enfoncent les portes ouvertes une fois les droits civiques accordés à ceux qui étaient discriminés, ce qui est en Occident le cas partout, manquent leur but, divisent le peuple, et ne font plus que manifester les ambitions sectorielles de la petite bourgeoisie de gauche, et l’individualisme de masse qui soumet les peuples au règne de la marchandise, dont ils ne pourront s’émanciper qu’en construisant à nouveau le socialisme.

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7 août 2013 3 07 /08 /août /2013 13:11

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Source:Collectif communiste Polex

 

                      Questions linguistiques et Europe capitaliste

                                        Francis Arzalier 

   La France s’est constituée au fil des siècles par la réunion de régions différentes les unes des autres par leur histoire et par leur culture : certaines avaient été rattachées au royaume Capétien par un arrangement entre le Roi et un seigneur féodal, comme le Gévaudan au 12ème siècle ou la Lorraine au 18ème, d’autres par de brutales conquêtes comme la Corse sous Louis xv ; certains des peuples qui les composaient parlaient la langue française, d’autres des langues celtiques (en Bretagne), germaniques (en Alsace et Lorraine du nord), occitanes (tout le sud du royaume, du Massif Central aux Pyrénées), voire italiques (la Corse).

Cette mosaïque de peuples avait jusqu’en 1789, comme seul lien, l’allégeance à l’autorité royale, à l’état centralisateur créé par Louis XIV et ses successeurs.

Elle n’est devenue la nation française que par la révolution antiseigneuriale de 1789 qui amena le ralliement volontaire des habitants de toutes les régions de France à un ensemble politique exprimant la volonté de la majorité des citoyens. C’est en ce sens que le chef reconnu des Corses, Paoli, fut accueilli avec enthousiasme par l’Assemblée Nationale à Paris et y exprima le ralliement de l’île à la nation française, phénomène irréversible, renforcé encore au 19ème siècle par l’épopée napoléonienne et au 20ème siècle par la participation des insulaires à la guerre de 1915-1918, à l’aventure coloniale de la France et à la Résistance antifasciste.

Cet attachement ultra majoritaire à la nation française de l’immense majorité des français n’a absolument pas supprimé les singularités culturelles locales : elles existent dans chacune des régions de France, avec plus ou moins de force. Jusqu’au milieu du 20ème siècle, les milieux populaires s’exprimaient en breton à Brest, en langues occitanes à Toulouse, en langue corse à Ajaccio, Corte ou Bastia. Partout dans ces régions rassemblées, la langue française n’était que celle quotidienne de la bourgeoisie, malgré le centralisme linguistique et politique de l’état français, de Napoléon à la troisième République.

On confond trop souvent dans le langage courant « jacobinisme » et centralisation : cet amalgame péjoratif a été inventé au début du 20ème siècle par Maurras, l’idéologue de l’extrême droite, qui exprimait ainsi sa haine de la Révolution de 1789. En réalité, les « Jacobins », partisans et militants de la révolution antiseigneuriale, ont inventé la nation française, réunion volontaire de citoyens de France, nous leur en sommes redevables. Ils n’étaient certainement pas tous favorables à la centralisation, inventée par la monarchie. Les « Jacobins » du Languedoc s’exprimaient souvent en occitan et ceux de Nantes en breton en 1789. Certains des dirigeants de la Commune de Paris en 1871 se disaient « Jacobins » et pourtant les communards avaient un idéal de république totalement décentralisée, réunion volontaire de communes élues, représentatives des travailleurs.

Il est vrai que la bourgeoisie révolutionnaire a, dès 1792, repris à son compte le centralisme politique et linguistique inventé par les monarques. L’abbé Grégoire était ainsi favorable à l’éradication des « patois » régionaux : il était affilié aux Girondins qui passent pourtant pour plus « provinciaux » que les Montagnards ou les Robespierristes…C’est en réalité Napoléon, devenu Empereur des Français, qui renforça la centralisation et la troisième République bourgeoise accéléra le processus notamment en généralisant l’école laïque obligatoire - Ce qui avait une dimension progressiste mais s’accompagnait de la destruction programmée des cultures et des langues régionales au profit d’une francisation, selon les codes culturels de la bourgeoisie – Ce fut le cas dans le Languedoc et en Provence où les langues d’oc devinrent résiduelles au milieu du 20ème siècle. La langue locale ne demeura vivante et quotidienne dans les milieux populaires que dans des régions particulières comme le Pays Basque ou la Corse, préservée par l’insularité, et aidée depuis 20 ans par le volontarisme des élus locaux. De ce fait, la langue corse, écrite et codifiée comme elle ne l’était pas en 1900, est présente maintenant à l’école et à la télévision, est parlée quotidiennement surtout dans les villages de l’île et sert de substrat à une culture toujours vivante dans la chanson, les manifestations artistiques, les foires, les traditions culinaires et les mentalités héritées d’une société pastorale et patriarcale. Ceci étant, ne nous leurrons pas : on ne décrète pas l’usage d’une langue par décret politique, si l’évolution sociale et économique la condamne à dépérir. Celle de Corse est vivante, en 2013, parallèlement au français mais les Corses, même ceux nés dans l’île et y ayant toujours vécu (ce qui est rare en ce pays d’immigration) même les plus âgés sont bilingues. La majorité des insulaires comprennent le corse mais le parlent fort peu ou mal : il suffit de les écouter s’exprimer en cette langue à FR3 Corse pour le savoir. Par ailleurs, une partie (un quart ?) de la population de Corse est originaire d’autres régions du continent, Provence ou Bretagne ou d’autres pays : ceux marocains parlent berbère plutôt qu’arabe, d’autres portugais et français même s’ils ont acquis la maîtrise du corse pour des raisons professionnelles (ainsi la speakerine météo-culinaire de FR3 Corse dont la langue maternelle est le serbo-croate).

Le dilemme centralisme-décentralisation est une vieille dimension du débat politique en France qui ne recouvre pas toujours l’opposition droite-gauche. La droite conservatrice ou réactionnaire sait parfois démagogiquement se proclamer respectueuse des droits des « provinciaux » contre « le centralisme parisien ». Ainsi le fit le régime du Maréchal Pétain, chantre des « vertus de la terre »contre l’esprit « envieux et jouisseur » des villes ouvrières, coupables d’avoir soutenu le Front Populaire en 1936 et ainsi mérité la défaite de 1940. La réalité du pouvoir Vichyste fut tout autre : l’état du Maréchal fut un des plus centralisateurs du 20ème siècle ; il multiplia les technocrates économiques au service de l’état central et du patronat (le MEDEF en est l’héritier actuel) et supprima les élus communaux, la Délégation Spéciale, remplaçait le conseil municipal élu et faisait appliquer les directives de l’état.

La « gauche » française a toujours été ambiguë sur les problèmes de centralisation. Ainsi, les Opportunistes et les Radicaux qui ont animé la troisième République, héritiers bourgeois de 1789, étaient convaincus qu’il fallait une France uniforme, du sud au nord avec une seule langue et de droits identiques ; mais, en même temps, cette République organisa à la fin du 19ème siècle les 30.000 communes de France, gérées par un conseil municipal et un maire élu par les citoyens : un système décentralisé qui est unique en Europe et qui est bien menacé aujourd’hui face au rouleau compresseur de « l’Union Européenne ».

Le mouvement progressiste et révolutionnaire français n’a pas toujours été très clair sur ces questions. Certains qui s’en disaient furent “bonapartistes” : Chevènement qui se clamait alors la gauche du Parti Socialiste était, à un tel point « centraliste », qu’il prétendit un jour qu’il n’existait qu’une seule culture française de Belfort à Bastia : affirmation absurde, les Marseillais et les Flamands n’ignorent pas leurs différences même s’ils sont tous deux attachés à la nation française.

L’attitude des communistes à l’égard de l’identité et de la langue corses, réalités plus prégnantes qu’en d’autres régions de l’hexagone, a ainsi évolué au fil du temps et des évènements. Le PCF, dans ses premières années, appliquait à l’île et à ses habitants une grille de lecture anticolonialiste, inspirée de la jeune Internationale Communiste. Les corses avaient le droit, comme l’Alsace ou le Maroc, de se séparer de la France s’ils le désiraient. C’est sur ces bases que le Parti tint à Paris en 1931 des meetings contre l’envoi dans l’île de troupes occupant les villages sous prétexte de combattre le banditisme avec les militants de « l’Emancipation Corse ». Gabriel Péri, journaliste d’ascendance corse à l’Humanité, ajoutait prudemment que ce droit à la séparation ne valait que si le peuple concerné le désirait : il savait bien que dans l’île, la volonté indépendantiste était alors infime, même si un journal comme A Muvra y portait des revendications « corsistes » culturelles et politiques. Le PCF n’y avait, par ailleurs, que quelques adhérents.

Peu après, les prétentions conquérantes du fascisme italien (« Corsica, Nizza, Tunisia, a noi ») ont changé la donne. Le PCF et son journal, fers de lance de l’antifascisme, dénoncent les volontés d’annexion « irrédentiste » de Mussolini et de ses sympathisants insulaires : ils sont minoritaires mais influents au sein de la rédaction d’A Muvra, fascinés par l’idéologie fasciste, confondant dans le même rejet l’héritage de 1789 et le front populaire, à l’image d’une bonne partie de la droite française. Les communistes insulaires, peu nombreux mais actifs dans les mouvements sociaux, sont eux antifascistes et anti-irrédentistes avant 1939.

La défaite française et le régime de Vichy allié de l’Italie fasciste ne pouvaient que renforcer chez eux cette tendance, d’autant que leurs rangs se renforcent de quelques militants chassés de l’hexagone par l’interdiction du Pcf ou des anciens des Brigades Internationales en Espagne (Vittori). Dans la débâcle générale des partis de la troisième République (Droite et Radicaux), les quelques dizaines de militants corses vont réussir, entre 1941 et 1943, à organiser, pratiquement seuls, la Résistance Insulaire. Fait unique parmi les régions françaises, le Front National (mot d’ordre unitaire de résistance nationale à l’occupation germano-italienne - nazie et fasciste - lancé par le PCF) animé par les communistes, finit par réunir, à peu près, tous les résistants de l’île et déclencha l’insurrection armée de l’été 1943. Elle sera victorieuse après de rudes combats, de cruels sacrifices, grâce à l’aide de soldats français et coloniaux envoyés d’Algérie par Giraud et la « France Libre » et grâce à la défection de l’armée italienne du camp fasciste. Les communistes, grâce au rôle éminent qu’ils ont joué dans cette lutte, au prestige de leurs militants et de leurs martyrs, ont, dès la libération, une forte audience dans l’île malgré l’opposition conjointe de la droite gaulliste et des notables radicaux. A l’inverse, les « Corsistes » de A Muvra sortent discrédités de la guerre du fait de la collusion de certains d’entre eux avec les occupants italiens et les irrédentistes.

La « collaboration  active » fut en Corse bien plus le fait des adhérents du PPF pro-nazi de Doriot et Sabiani que des défenseurs de l’identité corse. Cependant, les communistes insulaires qui n’avaient pas hésité à publier en mai 1943 un « Appel au peuple corse » faisant appel à son héritage culturel spécifique sont en 1945 les plus virulents contre les Muvristes, volontiers accusés de liens avec le fascisme vaincu. Pour longtemps, toute référence au « corsisme » sera suspecte parmi les héritiers de la Résistance, Gaullistes ou Communistes.

Après 1968, les mouvements culturels et politiques qu’on disait alors autonomistes ont ressurgi en Corse, mélange d’idéologies contradictoires, mêlant le gauchisme d’inspiration tiers-mondiste et l’activisme militaire influencé par l’extrême droite coloniale (les attentats du FLNC se réfèrent « aux nuits bleues » de l’OAS en Algérie). Toutefois, ces mouvements expriment souvent des revendications populaires parfaitement justifiées contre l’accaparement des terres cultivables par les rapatriés d’Algérie, pour la défense et la valorisation de la langue et de la culture corses souvent occultées ou niées, contre le « clanisme » ou « clientélisme » dominant les relations politiques insulaires. Le PCF corse de ces années-là s’en est bien souvent tenu à dénoncer(à juste titre) les clandestins armés, leurs attentats et leurs rackets, les autonomistes(et plus tard nationalistes) sans réussir à reprendre à son compte leurs exigences culturelles, linguistiques et politiques justifiées. D’autant que les reproches à leur encontre étaient simplistes (assimilation à l’irrédentisme, antifrançais) et oubliaient de pointer chez eux le plus critiquable, la haine réactionnaire de l’héritage progressiste de 1789 et des conquêtes ouvrières.

Nous vivons depuis le début du 21ème siècle une nouvelle étape du capitalisme, marqué par la mondialisation financière et son corollaire l’idéologie ultra libérale, véritable religion du marché selon laquelle rien ne doit s’opposer à la « libre concurrence » des capitaux, des marchandises, des salariés, ni les frontières, ni les lois, ni les volontés populaires : c’est ainsi que s’est mis en place, au gré des traités successifs, l’Europe supranationale qui en est aujourd’hui à imposer ses diktats d’austérité et de régression sociale au pays du continent, notamment à la France, avec l’assentiment des gouvernements successifs, de la droite et du PS. Dans ce contexte, les divers groupes nationalistes corses qui ont, pour l’essentiel, abandonné la « lutte armée » (les attentats, les meurtres sont aujourd’hui, avant tout, le fait de luttes internes au banditisme insulaire pour le contrôle de trafics et de spéculation immobilière) sont très favorables à l’Europe supranationale qui comme eux, vise à la destruction programmée des états nations, héritage en France de 1789 et des conquêtes sociales et politiques depuis deux siècles. Les « infra-nationalistes » de Corse, imprégnés d’idéologie libérale et rejetant l’héritage de 1789-93, apprécient la volonté bruxelloise de démanteler l’état français et de mettre en place de vastes régions, à l’image des lander allemands, sur des bases économiques ou ethniques avec des prérogatives amoindries des élus. Ils influencent, grâce à leur démagogie (contre l’accaparement des rivages) le quart environ de l’électorat insulaire.

Les communistes de Corse, encore influents du fait de leur rôle historique et bien que l’île soit dépourvue des industries nécessaires, ont à juste titre soutenu les mesures prises en faveur de la langue corse, son entrée à l’école, à la télévision, etc…Il était bien normal de répondre aux désirs de la majorité des citoyens insulaires, attachés à leur culture menacée par le tout-tourisme dévastateur. Ce n’est pas la langue corse qui menace à Bastia comme à Lille la langue nationale française mais l’anglo - américain, langue de l’empire mondial capitaliste. Les dirigeants étatsuniens et « européens » travaillent à l’imposer partout, avec l’assentiment de la bourgeoisie de France, grâce à internet, aux médias, dans l’enseignement, l’expression culturelle, l’entreprise, etc…

Favoriser le renouveau, la survie de la langue et la culture corse est une chose, s’en servir comme prétexte pour favoriser les entreprises politiques de l’Europe supranationale en est une autre : C’est ce que font avec un certain succès les divers groupes nationalistes corses, en proposant la « co-officialité » des deux langues, corse et français. Ce concept imprécis rendrait ainsi obligatoire la langue insulaire dans chaque administration, l’enseignement, la culture, etc…A chaque guichet de service public, de l’université, à l’école élémentaire, à l’entreprise commerciale et industrielle, les salariés devraient, dans cette logique, savoir communiquer en corse : ceux ignorant cette langue seraient-ils donc licenciés alors qu’ils sont parfois les plus nombreux ?

L’absurdité des conséquences possibles cache mal une volonté discriminatoire évidente : faudrait-il rendre aussi obligatoire au moindre guichet les autres langues parlées dans l’île, le portugais, l’arabe, le berbère, etc…

Ces considérations n’ont pas tenu compte devant la logique politicienne : En avril 2013, sur proposition des nationalistes, l’Assemblée Territoriale de Corse a approuvé à l’unanimité le statut de co-officialité. Certains élus de droite (UMP) qui se sont toujours illustrés par leurs réactions centralisatrices, ceux de la gauche (majorité radicale) ont voulu montrer qu’ils n’étaient pas moins attachés à la langue corse que les nationalistes - avec peut-être une arrière - pensée : Le président de l’Exécutif, Paul Giacobbi, qui ne parle pas lui-même la langue de l’île, sait bien que la constitution française interdit la co-officialité et que la majorité socialo-radicale dont il fait partie à l’Assemblée Nationale ne votera pas une réforme constitutionnelle à ce sujet. Ce qui ne l’empêche pas de s’indigner à Ajaccio de « l’intolérance linguistique française » (Corse Matin, 07 juin 2013). Rien d’étonnant : le sujet est, en Corse, un excellent dérivatif pour éviter de parler des problèmes réels, la sous-industrialisation, le chômage, le grand banditisme et la spéculation foncière et immobilière qui ravagent la société insulaire. Comme à Paris, le battage médiatique autour du mariage homosexuel permet au Président Hollande de ne pas s’appesantir sur le chômage et la destruction des industries.

Plus problématique, est, à l’occasion, le vote des élus communistes à l’Assemblée de Corse pour la co-officialité. Erreur d’analyse ? Désir opportuniste de ne pas se couper d’une majorité de gauche dont on fait partie à Ajaccio ? Volonté de permettre des alliances avec la gauche radicale aux prochaines élections ? Ce vote, en tous cas, a été très critiqué au sein des militants insulaires et risque de laisser quelques traces. Ne faudrait-il pas élargir ce débat sur langue et culture en tenant compte des volontés de l’Europe supranationale et du capitalisme mondialisé ? En l’occurrence, ce projet de co-officialité n’est pas né de l’aspiration majoritaire des citoyens de Corse mais il est un élément de l’offensive actuelle de l’Union Européenne contre les états nationaux d’Europe. Cette offensive est multiforme : à l‘initiative des partisans locaux et nationaux de l’Europe fédérale, l’Alsace a vécu en mai un référendum dont l’objectif était de supprimer les départements au profit d’une grande région. Sous prétexte de simplification administrative, on effaçait les élus départementaux au profit d’une Assemblée unique dont le rôle eut été essentiellement de voter le budget mais les décisions fondamentales relevaient, dans cet attelage, du Président de l’Exécutif Régional à l’image des lander allemands. L’opération a capoté parce que les habitants du Haut Rhin ne tenaient pas à se voir imposer à tout instant les choix de la conurbation strasbourgeoise majoritaire et « capitale européenne ».
Cette offensive  Européenne Fédéraliste et Capitaliste se déploie aussi contre les défunts services publics nationaux : l’UE a programmé la mort de la SNCM (Société Nationale Maritime Corse-Méditerranée) en lui infligeant d’énormes amendes sous prétexte de la punir d’avoir touché des subventions publiques parce qu’elle assurait un service public. Déjà bradée en partie aux actionnaires privés, la SNCM aura du mal à survivre à la guerre commerciale avec des concurrents privés « européens »qui emploient des salariés aux salaires plus bas que ceux de France.

Cette ouverture à la concurrence « européenne » va démanteler aussi la SNCF, Air France, au détriment de la sécurité et de la régularité du service (moins de contrôleurs aériens, d’entretien du réseau, etc…). Tout cela, en fait, s’insère dans le projet d’Europe Fédérale Capitaliste.

Depuis sa création après la 2ème Guerre Mondiale, l’Union Européenne s’est constituée au service des possesseurs de capital comme une machine de guerre contre les salariés et les nations d’Europe avec pour seul objectif de faire du continent un grand marché sans entraves des capitaux, des produits, des hommes. Au fil des traités successifs (ROME, Maastricht, Lisbonne), l’UE a démantelé l’indépendance nationale économique et monétaire au profit de la banque centrale de Francfort, favorisé les délocalisations, le chômage, et, de ce fait, la xénophobie, etc…Elle en est aujourd’hui à imposer une politique d’austérité et de privatisations aux états d’Europe et parfois leurs dirigeants.

Le rôle des communistes est donc d’organiser les luttes populaires contre l’Union Européenne sans créer d’illusions sur « une autre Europe » supranationale (l’Assemblée Européenne a déjà eu une majorité de gauche, ce qui n’a rien changé à sa nocivité). Il faut exiger la dénonciation des traités, la sortie de l’OTAN, la restauration de l’indépendance nationale française en matière monétaire, économique, douanière et politique. Et, au premier chef, combattre toutes les initiatives de régression sociale et nationale de l’Europe supranationale et de ses partisans, bourgeoisie française ou séparatistes « régionaux » confondus.

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6 août 2013 2 06 /08 /août /2013 18:44

 

 

 

Le gouvernement va-t-il remettre en cause tous les acquis sociaux ?

Et maintenant les congés payés dans le collimateur !

Par Achille Blondeau, ancien secrétaire général de la fédération CGT du Sous-sol.

Il faut prendre au sérieux la récente attaque du directeur de l’Express, Christian Barbier, contre les congés payés. C’est un des plus connus de ces messieurs je-sais-tout qui pullulent dans les médias et véhiculent l’idéologie de la droite rétrograde. Après les salaires trop élevés, la durée hebdomadaire du travail trop courte, la retraite acquise de trop bonne heure et d’un coût ingérable, voilà maintenant les congés payés dans le collimateur. La bienveillance manifestée par François Hollande et son gouvernement envers le grand patronat encourage manifestement la mise en cause de tous les acquis sociaux sans exception. Un rappel historique s’impose.

Avant 1936, les ouvriers étaient condamnés au travail du 1er janvier au 31 décembre. La grève générale de juin 1936, avec occupation des mines et des usines, leur apporta, entre autres, deux semaines de congés payés l’an. Une véritable révolution. Alors âgé d’une douzaine d’années, j’en conserve un vif souvenir. Je revois la sortie avec vélos fleuris que la section syndicale CGT des mineurs de Raimbeaucourt (Nord), dont mon père était le secrétaire, avait organisée pour aller pique-niquer aux étangs de Brunémont. C’était le défilé de la victoire remportée sur les compagnies minières. Enfin l’on pouvait se reposer deux semaines consécutives sans devoir se lever à 4 h 30 et passer la journée au fond de la mine ! C’était une nouvelle vie qui commençait…

Les congés payés étaient tellement populaires que le gouvernement de Vichy n’osa pas les supprimer. Mieux : en juillet 1942, en butte au développement des conflits sociaux, il fit quelques concessions, dont la création des congés d’ancienneté : un jour pour cinq années passées dans la même entreprise, avec un maximum de six jours.

En 1955, les métallos de la forteresse ouvrière qu’était l’usine Renault de Boulogne-Billancourt ouvrirent la voie à la troisième semaine, qui fut généralisée par la loi du 7 mars 1956. Quant à la quatrième semaine, elle fut incluse dans quelques accords de branche en 1962. Elle figurait dans l’accord conclu début avril 1963 au sein des Charbonnages de France, mettant fin à une grève générale de 35 jours. Il fallut attendre le 16 mai 1969 pour que le Sénat adopte la loi, qui avait déjà fait l’objet de nombreux accords de branche et d’entreprise. La grève générale de 1968 continuait de payer. La cinquième semaine est un des résultats de la victoire électorale de l’union de la gauche et a été promulguée par l’ordonnance n° 8241 du 16 janvier 1982.

C’est le mouvement social, l’action syndicale et les luttes revendicatives qui ont fait progresser par étapes la législation pour aboutir aux cinq semaines actuellement en vigueur.

Les congés payés, c’est la possibilité de décompresser après une année de travail harassante, la possibilité de rendre 
visite à la famille, de voyager en France ou à l’étranger. C’est vivre en totale liberté. Et qui pourrait nier que l’allongement de la durée de vie des travailleurs résulte pour une part de la réduction de la durée effective du travail ?

On se moque du monde, on se moque de la vérité lorsqu’on affirme que l’actuel chômage massif est dû à des salaires et des retraites trop élevés et à une durée du travail insuffisante. Eh oui, travailler plus et plus longtemps tout en gagnant moins, voilà les solutions que les médias martèlent alors que le nombre de millionnaires, actionnaires parasites pour la plus grande partie, est en constante augmentation.

Pendant près de quarante ans après la Libération, les besoins pour la reconstruction et le développement de l’économie ont été tels que le chômage a épargné la France. Il est, depuis, en augmentation continue et a atteint un niveau intolérable, avec ce que cela suppose de souffrances physiques et morales. Parmi les causes, il y a certes l’insuffisance du pouvoir d’achat. Mais mesure-t-on à leur juste valeur les progrès immenses et continus de la productivité du travail ? Nous vivons depuis quelques décennies dans une révolution technique et technologique permanente, qui, visiblement, n’est pas près de s’arrêter. Il faut mettre les rapports sociaux en concordance avec cette révolution par un changement fondamental du partage des fruits du travail et par une réduction de sa durée. Ainsi disparaîtra le chômage. Ainsi fera-t-il bon vivre. Un très vaste programme.

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6 août 2013 2 06 /08 /août /2013 16:51

"Pour nos combats de demain, pour un monde plus libre, plus juste, plus égalitaire, plus fraternel et solidaire, nous devons maintenir vivante la mémoire de nos luttes".

Gunter Holzmann

Cinq yeux, une seule langue

Contrairement à ceux des pays de langues latines, les dirigeants des pays anglo-saxons – en premier lieu ceux des Etats-Unis – ont depuis longtemps compris la densité stratégique du lien linguistique entre les individus. Le contraste avec la France, pour ne prendre que cet exemple, est frappant : à Paris, il y a certes toujours un ministère chargé de la francophonie dans chaque gouvernement, mais sans moyens financiers, sans visibilité médiatique et surtout sans la moindre influence politique. Qu’ils se réclament de la gauche ou de la droite, la plupart des responsables publics, au pouvoir ou dans l’opposition, prononcent occasionnellement quelques phrases de soutien à la francophonie – comme s’ils déposaient de manière rituelle un bouquet de fleurs sur une tombe – mais ils n’y croient pas une seconde. Ils sont trop fascinés par l’anglais, et leur seule véritable politique linguistique consiste à promouvoir l’usage de cette langue dans le système éducatif et dans la vie professionnelle des Français.

A Londres et à Washington, la démarche est tout autre : pas de grands discours ni d’institutions de défense de l’ « anglophonie », mais une action permanente, discrète et persévérante pour imposer l’anglais comme langue « naturelle » des échanges internationaux, de la science, de la technologie, des forces armées et des industries du divertissement. En conséquence, et avec le soutien actif des « colonisés » locaux – les Européens figurant parmi les plus zélés –, la toute-puissante galaxie communicationnelle anglo-saxonne présente ceux qui refusent encore de se plier à cette volonté hégémonique comme autant de passéistes, de protectionnistes, voire de nationalistes. S’il existait le moindre doute sur le potentiel de solidarité politique induit par l’usage partagé d’une langue maternelle [1], il suffit d’observer l’énorme dispositif d’espionnage planétaire mis en place par l’Agence nationale de sécurité (NSA) des Etats-Unis et révélé par Edward Snowden.

Ce n’est plus un secret : les « grandes oreilles » qui écoutent tous les messages de la planète pour le compte des Etats-Unis ne sont pas seulement américaines, mais également australiennes, britanniques, canadiennes et néozélandaises. Dans le jargon de la « communauté du renseignement », on désigne les pays concernés comme les « cinq yeux ». Cinq yeux qui n’ont qu’une seule langue : l’anglais. En fait, les stratèges américains n’accordent leur confiance totale qu’aux Britanniques et aux ressortissants des trois anciens dominions « blancs » : l’Australie, le Canada et la Nouvelle-Zélande. Ce Club des Cinq a été formalisé par des traités secrets signés après la deuxième guerre mondiale, le premier d’entre eux, en 1946, entre Washington et Londres, étant le United Kingdom-United States Communications Intelligence Agreement (Ukusa).

Quelle que soit la couleur politique des gouvernements, ces accords n’ont jamais été remis en cause, ni par l’un des Cinq anglophones « purs » ni par un gouvernement extérieur. Ils devraient pourtant poser un sérieux problème à l’Union européenne (UE). Pas seulement parce que ses institutions et ses capitales sont placées sous surveillance par l’ « allié » américain, mais surtout parce que l’un de ses Etats membres, le Royaume-Uni, est un complice actif de cet espionnage. C’est l’une des raisons pour lesquelles Barack Obama tient absolument à ce que Londres reste au sein de l’UE. On se demande même pourquoi la NSA dépense beaucoup d’argent à espionner Bruxelles, alors qu’elle a directement accès à tous les documents réputés confidentiels de sa bureaucratie via le 10 Downing Street et les fonctionnaires britanniques des institutions communautaires…

Notes

[1] Dans ses Mémoires, Winston Churchill fait régulièrement référence aux « peuples de langue anglaise » dotés d’un statut particulier au sein des Alliés du temps de guerre. Il devait expliciter cette solidarité linguistique dans sa théorie des « trois cercles » : http://www.medelu.org/Le-Royaume-Uni-Etat-offshore-de-l

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6 août 2013 2 06 /08 /août /2013 16:36
La volonté de perfectionnement du système d’enseignement
Auteur: Livia Rodríguez Delís | Source: Granma Internacional | 04 , Août 2013

La stratégie mise en place dans l’enseignement primaire et secondaire par le ministère de l’Éducation pour l’année scolaire qui vient de s’achever, a été qualifiée de positive par la vice-ministre de ce secteur, Margarita Macpherson, qui a présenté un bilan du travail accompli et a annoncé certaines des perspectives pour 2014.

Parmi les objectifs prioritaires pour l’année scolaire 2012-2013 figuraient l’intensification de la formation des enseignants, le suivi des études des enfants et des jeunes, la mise en œuvre du programme directeur d’éducation des valeurs, le perfectionnement de la langue maternelle et la préparation patriotique et culturelle des élèves.

Pendant cette étape, l’enseignement primaire a mené des actions visant à consolider la formation du personnel enseignant, et a adopté le système de deux enseignants par classe dans les endroits où la couverture le permet.

« Nous devons nous pencher sur les problèmes, comme la pénurie d’instituteurs que connaissent certaines provinces », a-t-elle souligné.

Dans l’enseignement secondaire, le travail a été axé sur l’assistance et le suivi des professeurs et de leurs disciplines.

« Les écoles secondaires ont beaucoup travaillé sur la base des insuffisances observées, notamment pour ce qui est de l’orientation professionnelle, et de la poursuite d’études spécialisées, ainsi que du système d’évaluation », a-t-elle ajouté.

La vice-ministre a évoqué certains résultats sur les possibilités des carrières offertes aux élèves qui terminent leur troisième, et qui peuvent parachever leur formation dans des instituts pré-universitaires, des écoles de métiers et d’autres centres spécialisés en comptabilité, électronique, informatique, infirmerie, dans l’enseignement, et comme techniciens moyens ou ouvriers qualifiés.

La fonctionnaire a signalé que les instituts pré-universitaires du pays ont diplômé cette année 41 408 élèves sur un total de 43 458, et que 30 860 d’entre eux se sont présentés aux examens d’admission universitaire, dont 22 489 ont été reçus à ces concours, soit 72,9 %.

Concernant l’avenir des élèves qui ne se sont pas présentés à ces examens ou ceux qui ont été recalés, environ 21 000, plusieurs propositions leurs sont offertes, dont des formations de deux ans (de niveau moyen) dans les universités de sciences pédagogiques, d’ouvrier qualifié, de technicien moyen et d’ouvrier qualifié de la santé, entre autres.

La vice-ministre a souligné que même si l’on observe des résultats positifs dans certains domaines, d’autres restent à perfectionner comme l’évaluation scolaire.

 

 

 

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6 août 2013 2 06 /08 /août /2013 15:08

 

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Source:Jacky Micaelli

 

Andalousie : des centaines d’ouvriers se réapproprient des terres livrées à la spéculation

 Au sud de l’Espagne, des ouvriers agricoles occupent une ferme de 400 hectares, menacée par la spéculation. Ils contestent une répartition féodale des terres, réservées aux grands propriétaires. Et développent une agriculture biologique et paysanne, qui nourrira bientôt des milliers de personnes. Reportage en Andalousie, dans la ferme de Somonte, devenu le symbole d’une lutte populaire contre les inégalités et pour la souveraineté alimentaire. « Land and freedom », version 2013.

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« Quand nous sommes arrivés à Somonte pour occuper les terres, c’était un matin très tôt, au lever du soleil, se souvient Javier Ballestero, ouvrier agricole andalou. J’ai été surpris par le silence. Il n’y avait pas d’oiseaux sur ces terres ! Pas de vie ! Rien ! » C’était il y a presque un an, le 4 mars 2012. Cinq cents journaliers agricoles, des habitants des villages voisins et des citoyens solidaires venus de toute la région ont commencé à occuper la « finca » (ferme en espagnol) de Somonte. Le lendemain, la propriété, qui appartient au gouvernement autonome régional, devait être vendue aux enchères, très certainement à l’un des puissants propriétaires terriens de la zone, qui l’aurait achetée à un prix avantageux.

Le SOC-SAT [1], syndicat d’ouvriers agricoles qui a organisé l’occupation, est habitué aux luttes foncières. C’est lui qui a mené tous les combats historiques des journaliers andalous depuis les années 70. Mais les occupations de terre ne datent pas d’aujourd’hui. En 1936, elles s’étaient multipliées. Javier évoque la répression féroce qui s’en suivit lors de la victoire des franquistes. Un puissant propriétaire terrien fit exécuter 350 journaliers à Palma del Rio, le village voisin de Somonte. La plupart des terres qui jouxtent la « finca » appartiennent aux descendants de cet homme.

« La terre est à vous. Reprenez-la ! »

En ce matin hivernal, une trentaine de personnes se pressent autour d’un brasero, installé devant la petite cuisine de la « finca ». Deux hommes réparent un vieux tracteur Fiat sur lequel est fiché un drapeau andalou portant le sigle SOC-SAT. Quand le tracteur finit par démarrer, des responsables du lieu répartissent les tâches entre les occupants et les visiteurs solidaires, selon les décisions prises la veille au soir en assemblée générale. Un groupe ira désherber le champ d’oignons dont les plants viennent d’être mis en terre. Un autre ramassera les piments, les Piquillo, la variété locale, rouge sang, qui seront ensuite mis à sécher en grappes. Le troisième groupe préparera le repas collectif de la mi-journée.

Une dizaine de militants portugais d’extrême gauche, en visite, et quelques militants français et espagnols, de passage ou séjournant à Somonte, se dirigent vers le hangar où est entreposé le matériel agricole. Peint sur le bâtiment, un slogan rappelle les enjeux de l’occupation : « Andalous, n’émigrez pas. Combattez ! La terre est à vous. Reprenez là ! » Au passage, les travailleurs matinaux croisent une patrouille de la Guardia civil, qui vient relever, comme tous les jours, les numéros des plaques d’immatriculation des voitures stationnées sur le parking de la ferme. A voix basse, les moqueries fusent. Les guardias demeurent indifférents. Ils ne descendent jamais de leur véhicule. Ils notent et repartent.

Développer une agriculture biologique paysanne

Près du hangar, sous les regards complices de Malcolm-X, Zapata et Geronimo, immortalisés par un artiste sur un mur, Javier et son collègue Pepe distribuent sarcles et bêches, puis accompagnent les militants jusqu’au champ d’oignons. Les allées sont interminables. Briefés par les deux hommes, les militants se courbent et s’accroupissent. Les herbes résistent, déchirent les doigts. Une main arrache par inadvertance un plant d’oignon. Un pied en écrase un autre. Difficile de s’improviser paysan. Ceux qui ont l’habitude avancent en ligne. Les autres tentent de s’appliquer, s’assoient, redressent leur dos… Les conversations vont bon train. Les chants révolutionnaires s’élèvent, repris en chœur.

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Peu à peu, la brume se lève. Apparait en contre-bas la plaine du fleuve Guadalquivir, qui s’étend à perte de vue dans cette partie de la province de Cordoue. Une terre rase, ondulante, sans un arbre, sans une haie. Cette même terre épuisée, sur laquelle poussera en été, sous la chaleur ardente, blés ou tournesols. Les journaliers qui occupent les quatre cents hectares de Somonte ont décidé d’abandonner ces pratiques agricoles intensives. « Depuis que nous sommes ici, les oiseaux sont revenus et la vie aussi, confie Javier. L’homme appartient à la terre. Nous devons la respecter et veiller sur elle. C’est pour cela que nous allons faire ici de l’agriculture biologique paysanne. » Pour développer une agriculture en rupture avec le modèle dominant, les journaliers andalous font appel à leur sensibilité et à leur mémoire, ravivée par leurs parents ou leurs grands-parents.

Contre une répartition « féodale » des terres

Comme la plupart des 25 occupants permanents de la finca, Lola Alvarez se définit comme « journalière agricole, depuis toujours », et fière de l’être. Elle rappelle que les premiers pieds de tomates plantés dans le jardin de Somonte proviennent de semences très anciennes apportées par son père de 84 ans. « Dès que nous avons occupé Somonte, beaucoup de personnes âgées sont venues nous apporter des semences de piments, d’oignons, de laitues… Toutes les semences traditionnelles qu’elles avaient héritées de leurs parents et qu’elle avaient conservées et protégées précieusement année après année. » Les occupants ont aussi reçu des graines du réseau andalou Semences et de la coopérative française Longo Maï. Somonte sera libre de semences transgéniques et de pesticides. « Nous sommes fatigués de voir ceux qui spéculent avec la terre spéculer aussi avec les produits chimiques, avec les semences et avec l’eau. Il va être difficile de mettre les 400 hectares en agriculture biologique mais nous allons le faire », explique simplement Lola.

Les occupants ont aussi décidé d’en finir avec l’injuste et scandaleuse répartition féodale des terres en Espagne qui fait que la duchesse d’Alba possède encore 30 000 hectares de terres et le duc del Infantado, 17 000. Plus de 60 % des terres les plus riches du pays sont entre les mains d’une poignée de puissantes familles, qui spéculent avec elles et perçoivent la majorité des aides agricoles [2]. « La terre n’appartient à personne. Elle n’est pas une marchandise, s’insurge Lola. Elle doit être entre les mains de celles et de ceux qui la travaillent. Nous l’occupons pour nourrir nos familles et vivre dignement. »

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Javier Ballestero, né dans une famille paysanne anarchiste, se réclame encore de cette tradition. « Les moyens de production doivent être au service du peuple. Pour cultiver sainement, nous n’avons pas besoin d’un patron qui nous exploite et nous vole. Nous voulons décider nous-mêmes de notre avenir. » Dans les années 80, pour initier une réforme agraire, le gouvernement autonome andalou (dirigé par le Parti socialiste ouvrier espagnol, PSOE) avait acheté plusieurs dizaines de milliers d’hectares aux grands propriétaires terriens. Il les avait grassement payés, pour qu’il n’y ait pas trop de mécontents. Mais n’avait pas redistribué les terres. L’objectif étant surtout de désamorcer un vaste mouvement d’occupations de terres organisé par le SOC qui réclamait alors des expropriations sans indemnisation.

Droit d’usage

Une partie de ces terres sont alors louées à des coopératives de petits paysans. Mais la grande majorité d’entre elles demeurent sous la responsabilité de l’Institut andalou de la Réforme agraire (IARA), et sont consacrées soit à des cultures intensives, soit à de vagues projets destinés à la recherche, pourvoyeurs d’importantes subventions européennes. Quelques hectares de la finca Somonte servaient ainsi de champs d’expérimentation à des cultures destinées à la production d’agro-carburants. Aujourd’hui, les socialistes dirigent toujours le gouvernement autonome. Comme les caisses sont vides, 22 000 hectares de terres appartenant à l’IARA ont été mis en vente aux enchères en 2011. Plus de la moitié ont été vendus.

« Le SOC a mené des occupations très dures dans les années 80. Elles ont notamment abouti à la création de la coopérative El Humoso, dans le village de Marinaleda, sur 1 200 hectares expropriés à la duchesse d’Alba », commente Lola Alvarez. « Depuis des années, nous ne menions plus que des occupations symboliques pour tenter d’infléchir la politique du gouvernement. Mais quand nous avons vu que les terres gérées par le gouvernement andalou allaient revenir entre les mains des spéculateurs, nous avons décidé de reprendre les occupations effectives. » Depuis l’occupation, la vente des terres a été suspendue. Mais les occupants ne souhaitent pas devenir propriétaires de Somonte. Il réclament un simple droit d’usage. Rappelant que depuis 20 ans, ces 400 hectares n’ont nourri personne.

Somonte, symbole d’une lutte populaire

L’Andalousie connaît actuellement un taux de chômage record de 34 % pouvant aller jusqu’à 63 % chez les jeunes de moins de 25 ans [3]. De nombreux Andalous, partis travailler comme ouvriers du bâtiment dans d’autres régions d’Espagne, reviennent aujourd’hui chez eux et proposent leur force de travail sur un marché agricole andalou déjà saturé et en crise. Avec la mécanisation à outrance et les mauvaises récoltes des oranges et des olives, il est désormais impossible aux 400 000 ouvriers agricoles de la région de réunir les 35 journées de travail annuelles nécessaires pour bénéficier d’une allocation mensuelle de 400 euros.

Fin 2012, le parlement andalou a demandé que le nombre de journées de travail exigé soit diminué. En vain. Cette crise sociale n’alarme pas les grands propriétaires terriens qui profitent de la situation pour mettre en concurrence les journaliers andalous avec la main d’œuvre immigrée, bien moins payée. Le SOC-SAT réunit des ouvriers agricoles de tous les horizons et organise régulièrement des grèves pour défendre leurs droits. Il dénonce aussi les injustices sociales, en organisant dans des supermarchés des opérations de récupération de produits alimentaires de base, distribués ensuite à des cantines de quartiers pauvres.

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Durant l’été 2012, des marches ouvrières ont parcouru toutes les provinces andalouses pour dénoncer les mesures d’austérité. Une grande ferme appartenant à l’armée, laissée à l’abandon, a été brièvement occupée. Ce contexte social et politique tendu, et toutes ces luttes, font aujourd’hui de Somonte un symbole très populaire de la capacité des ouvriers à prendre en main leur destin. L’alimentation est au cœur des luttes.

Nourrir des milliers de familles de la région

Peu à peu, avec le soutien des anciens, d’ingénieurs agronomes, d’organisations locales et de réseaux de solidarité internationaux, le projet agricole de Somonte prend corps. Trois hectares de légumes ont déjà été mis en culture pour l’autoconsommation, la vente sur les marchés locaux ou dans une coopérative de consommateurs de Cordoue. Plusieurs dizaines d’hectares vont être consacrés à des cultures maraîchères. Quarante hectares seront réservés à de grandes cultures en rotation avec notamment du blé biologique. Les occupants de Somonte envisagent de planter près de 1 500 arbres de variétés locales, de développer des vergers d’abricotiers, de cerisiers, d’amandiers, de créer une oliveraie, d’entretenir des haies.

En décembre 2012, près de 700 arbres sont plantés le long du domaine. Une eau saine sera récupérée grâce à des retenues, des puits et à une protection des petits cours d’eau existants. Les occupants veulent réunir rapidement un troupeau d’au moins 300 brebis. Une grande partie de la production agricole de la finca sera transformée sur place dans des ateliers. Le projet agro-écologique et social de Somonte, organisé sous forme de coopérative de travailleurs, pourra donner du travail à plusieurs centaines de personnes et permettre à des milliers de familles de la région de se nourrir.

Occuper les terres, les logements et les banques

La situation de Somonte est aujourd’hui suspendue à la situation politique en Andalousie. Le nouveau parlement autonome élu début 2012 est majoritairement à gauche. Cela n’a pas empêché le Parti socialiste de faire expulser les occupants de Somonte, le 26 avril 2012, le jour même où il signait un accord avec la Gauche Unie. Le 27 avril au matin, la finca était de nouveau occupée. Aucune menace d’expulsion n’a été formulée depuis, mais les négociations sont au point mort.

« S’ils nous expulsent 20 fois, nous occuperons 21 fois ! », ironise Lola. « Nous n’avons pas le choix. Le gouvernement ne sait pas comment réagir. Et nous, pendant ce temps, nous montrons qu’une autre voie est possible. Nous disons qu’il faut occuper les terres pour avoir un travail et pour vivre. Mais il faut aussi occuper les logements pour donner un toit aux familles. Et il faut occuper les banques pour dénoncer les aides financières que nos gouvernements leur apportent tout en faisant payer les plus pauvres. Il faut occuper ! Voilà la solution. »

Texte et photos : Philippe Baqué

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Notes

[1] Le SOC-SAT est l’ancien Syndicat des ouvriers agricoles (SOC). En 2007, il a été rebaptisé, syndicat des travailleurs andalous (SAT).

[2] Voir « Andalousie : la terre contre la crise », Jean Duflot, Archipel, journal du Forum civique européen de juin 2012.

[3] Voir « Un Robin des bois en Andalousie », Sandrine Morel, Le Monde, le 29 août 2012.

Source :  Bastamag

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6 août 2013 2 06 /08 /août /2013 15:02

  Clio

 

 

 

                       Le jour où le monde a changé

                               Hiroshima, 6 août 1945

A 8 h 15 du matin, le 6 août 1945, le bombardier B-29 américain baptisé « Enola-Gay » et piloté par le commandant Paul Tibbets lâchait sur la ville japonaise de Hiroshima la première bombe atomique de l’histoire. C’était la fin de la seconde guerre mondiale, et le début de l’ère nucléaire. La bombe allait tuer, d’un coup, 100 000 personnes, et provoquer des formes inédites de souffrance humaine. L’Américain John Hersey fut l’un des premiers journalistes étrangers à se rendre sur place. Paru d’abord dans The New Yorker, son témoignage est considéré comme l’un des classiques du reportage de guerre.

par John Hersey, août 2005

Ce matin-là, avant 6 heures, il faisait si clair et si chaud déjà que la journée s’annonçait caniculaire. Quelques instants plus tard, une sirène retentit : la sonnerie d’une minute annonçait la présence d’avions ennemis, mais elle indiquait aussi, par sa brièveté, aux habitants de Hiroshima qu’il s’agissait d’un faible danger. Car chaque jour, à la même heure, quand l’avion météorologique américain s’approchait de la ville, la sirène retentissait.

Hiroshima avait la forme d’un ventilateur : la cité était construite sur six îles séparées par les sept fleuves de l’estuaire qui se ramifiaient vers l’extérieur à partir de la rivière Ota. Ses quartiers d’habitations et de commerces couvraient plus de six kilomètres carrés au centre du périmètre urbain. C’est là que résidaient les trois quarts des habitants. Divers programmes d’évacuation avaient considérablement réduit sa population. Celle-ci était passée de 380 000 âmes avant la guerre à quelque 245 000 personnes. Les usines et les quartiers résidentiels, ainsi que les faubourgs populaires, se situaient au-delà des limites de la ville. Au sud se trouvaient l’aéroport, les quais et le port sur la mer intérieure saupoudrée d’îles (1). Un rideau de montagnes fermait l’horizon sur les trois côtés restants du delta.

Le matin était redevenu calme, tranquille. On n’entendait aucun bruit d’avion. Alors, soudain, le ciel fut déchiré par un flash lumineux, jaune et brillant comme dix mille soleils (voir Comme dix mille soleils). Nul ne se souvient avoir entendu le moindre bruit à Hiroshima quand la bombe a éclaté. Mais un pêcheur qui se trouvait sur sa barque, près de Tsuzu, dans la mer Intérieure, vit l’éclair et entendit une explosion terrifiante. Il se trouvait à trente-deux kilomètres de Hiroshima et, selon lui, le bruit fut beaucoup plus assourdissant que lorsque les B-29 avaient bombardé la ville d’Iwakuni, située à seulement huit kilomètres.

Un nuage de poussière commença à s’élever au-dessus de la ville, noircissant le ciel comme une sorte de crépuscule. Des soldats sortirent d’une tranchée, du sang ruisselant de leurs têtes, de leurs poitrines et de leurs dos. Ils étaient silencieux et étourdis. C’était une vision de cauchemar. Leurs visages étaient complètement brûlés, leurs orbites vides, et le fluide de leurs yeux fondus coulait sur leurs joues. Ils devaient sans doute regarder vers le ciel au moment de l’explosion. Leurs bouches n’étaient plus que blessures enflées et couvertes de pus...

Des maisons étaient en feu. Et des gouttes d’eau de la taille d’une bille commencèrent à pleuvoir. C’étaient des gouttes d’humidité condensée qui tombaient du gigantesque champignon de fumée, de poussière et de fragments de fission qui s’élevait déjà plusieurs kilomètres au-dessus de Hiroshima. Les gouttes étaient trop grosses pour être normales. Quelqu’un se mit à crier : « Les Américains nous bombardent d’essence. Ils veulent nous brûler ! » Mais c’étaient des gouttes d’eau évidemment, et pendant qu’elles tombaient le vent se mit à souffler de plus en plus fort, peut-être en raison du formidable appel d’air provoqué par la ville embrasée. Des arbres immenses furent abattus ; d’autres, moins grands, furent déracinés et projetés dans les airs où tournoyaient, dans une sorte d’entonnoir d’ouragan fou, des restes épars de la cité : tuiles, portes, fenêtres, vêtements, tapis...

Sur les 245 000 habitants, près de 100 000 étaient morts ou avaient reçu des blessures mortelles à l’instant de l’explosion. Cent mille autres étaient blessés. Au moins 10 000 de ces blessés, qui pouvaient encore se déplacer, s’acheminèrent vers l’hôpital principal de la ville. Mais celui-ci n’était pas en état d’accueillir une telle invasion. Sur les 150 médecins de Hiroshima, 65 étaient morts sur le coup, tous les autres étaient blessés. Et sur les 1 780 infirmières, 1 654 avaient trouvé la mort ou étaient trop blessées pour pouvoir travailler. Les patients arrivaient en se traînant et s’installaient un peu partout. Ils étaient accroupis ou couchés à même le sol dans les salles d’attente, les couloirs, les laboratoires, les chambres, les escaliers, le porche d’entrée et sous la porte cochère, et dehors à perte de vue, dans les rues en ruines... Les moins atteints secouraient les mutilés.

Des familles entières aux visages défigurés s’aidaient les unes les autres. Quelques blessés pleuraient. La plupart vomissaient. Certains avaient les sourcils brûlés, et la peau pendait de leur visage et de leurs mains. D’autres, à cause de la douleur, avaient les bras levés comme s’ils soutenaient une charge avec leurs mains. Si on prenait un blessé par la main, la peau se détachait à grands morceaux, comme un gant...

Beaucoup étaient nus ou vêtus de haillons. Jaunes d’abord, les brûlures devenaient rouges, gonflées, et la peau se décollait. Puis elles se mettaient à suppurer et à exhaler une odeur nauséabonde. Sur quelques corps nus, les brûlures avaient dessiné la silhouette de leurs vêtements disparus. Sur la peau de certaines femmes – parce que le blanc reflétait la chaleur de la bombe, et le noir l’absorbait et la conduisait vers la peau –, on voyait le dessin des fleurs de leurs kimonos. Presque tous les blessés avançaient comme des somnambules, la tête dressée, en silence, le regard vide.

Des silhouettes humaines sur les murs

Toutes les victimes ayant subi des brûlures et les effets de l’impact avaient absorbé des radiations mortelles. Les rayons radioactifs détruisaient les cellules, provoquaient la dégénération de leur noyau et brisaient leurs membranes. Ceux qui n’étaient pas morts sur le coup, ni même blessés, tombaient très vite malades. Ils avaient des nausées, de violents maux de tête, des diarrhées, de la fièvre. Symptômes qui duraient plusieurs jours. La seconde phase commença dix ou quinze jours après la bombe. Les cheveux se mirent à tomber. Puis vinrent la diarrhée et une fièvre pouvant atteindre 41 degrés.

Vingt-cinq à trente jours après l’explosion survenaient les premiers désordres sanguins : les gencives saignaient, le nombre de globules blancs s’effondrait dramatiquement tandis qu’éclataient les vaisseaux de la peau et des muqueuses. La diminution des globules blancs réduisait la résistance aux infections ; la moindre blessure mettait des semaines à guérir ; les patients développaient des infections durables de la gorge et de la bouche. A la fin de la deuxième étape – si le patient avait survécu – apparaissait l’anémie, soit la baisse des globules rouges. Au cours de cette phase, beaucoup de malades mouraient d’infections dans la cavité pulmonaire.

Tous ceux qui s’étaient imposé un certain repos après l’explosion avaient moins de risques de tomber malades que ceux qui s’étaient montrés très actifs. Les cheveux gris tombaient rarement. Mais les systèmes de reproduction furent affectés durablement : les hommes devinrent stériles, toutes les femmes enceintes avortèrent, et toutes les femmes en âge de procréer constatèrent que leur cycle menstruel s’était arrêté...

Les premiers scientifiques japonais arrivés quelques semaines après l’explosion notèrent que le flash de la bombe avait décoloré le béton. A certains endroits, la bombe avait laissé des marques correspondant aux ombres des objets que son éclair avait illuminés. Par exemple, les experts avaient trouvé une ombre permanente projetée sur le toit de l’édifice de la chambre de commerce par la tour du même bâtiment. On découvrit aussi des silhouettes humaines sur des murs, comme des négatifs de photos. Au centre de l’explosion, sur le pont qui se situe près du Musée des sciences, un homme et sa charrette avaient été projetés sous la forme d’une ombre précise montrant que l’homme était sur le point de fouetter son cheval au moment où l’explosion les avait littéralement désintégrés...

John Hersey

John Richard Hersey (1914-1993), journaliste à Time Magazine et au New Yorker. Auteur, entre autres, de A Bell for Adano (prix Pulitzer, 1945) et de Hiroshima (New York, 1946), d’où sont tirés les extraits publiés ici. Il a consacré sa vie à la lutte antinucléaire.
 
                           Source: Le Monde Diplomatique
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6 août 2013 2 06 /08 /août /2013 14:26

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Isabelle Stengers : « La gauche a besoin de manière vitale que les gens pensent »

 

 

Les séries d'été de l'Humanité : Penser un monde nouveau. Enseignante à l’université libre de Bruxelles, la philosophe des sciences Isabelle Stengers dénonce la sorcellerie capitaliste et invite à croire dans la force d’un collectif puissant et multiple.

Isabelle Stengers 
a d’abord suivi une formation scientifique. Les travaux de cette physico-chimiste ont 
porté sur le temps 
et l’irréversibilité. 
Avec le physicien 
belge d’origine russe 
Ilya Prigogine, prix Nobel 
de chimie, elle a coécrit, en 1979, la Nouvelle Alliance. Élargissant son champ 
de compréhension, 
elle s’intéresse ensuite, en faisant appel aux travaux de Foucault et de Deleuze, à la critique de la science moderne. Isabelle Stengers devient philosophe des sciences. Elle travaille sur la critique de la psychanalyse et de la répression, par cette dernière, de l’hypnose. Dans la dernière période, elle se consacre à une réflexion autour de l’idée d’une « écologie des pratiques », d’inspiration constructiviste. 
En témoignent 
les sept volumes des Cosmopolitiques, mais aussi ses livres consacrés à l’économie et à la politique (la Sorcellerie capitaliste, avec Philippe Pignarre, 2005), ou encore à la philosophie (Penser avec Whitehead, 2006). Plus récemment, collaboratrice de la revue Multitudes, elle investit de plus en plus le champ politique avec Au temps des catastrophes (La Découverte, 2008). Dans son dernier ouvrage, Une autre science est possible ! (Empêcheurs de penser 
en rond/La Découverte, 2013), elle poursuit 
ce questionnement. 
Ses travaux, très denses 
et créatifs, sont une bouffée d’oxygène intellectuelle 
pour penser un autre monde possible et une source stimulante pour vivre 
les luttes anticapitalistes.

Dans Au temps des catastrophes, 
vous dites qu’une autre histoire 
a commencé. À partir de quand situez-vous la rupture ?

Isabelle Stengers. J’ai eu la conviction que quelque chose d’important était en train de se passer en 1995, lorsqu’un sondage a ­annoncé qu’une majorité de Français pensaient que leurs enfants vivraient moins bien qu’eux. Ils ne faisaient plus confiance au « progrès ». Depuis, nous avons eu les crises financières à répétition… Au temps des catastrophes a été écrit avant ces crises. À l’époque les émeutes de la faim liées à la spéculation financière et l’histoire de l’ouragan Katrina étaient déjà d’excellents exemples de ce qui pourrait bien nous attendre dans l’avenir. L’explosion des inégalités sociales, le désordre climatique, la pollution… feraient toujours plus de ravages, mais le cap de la ­croissance et de la compétitivité serait maintenu. J’ai écrit ce livre pour résister au désespoir, et pour ceux et celles qui tentent d’écrire une autre histoire, malgré les difficultés : il a été dit qu’il est plus facile aujourd’hui d’envisager la fin du monde et de la civilisation que celle du capitalisme. Mais ceux qui cherchent savent tous que l’impuissance que nous ressentons fait partie du problème.

Vous parlez d’une « Nouvelle-Orléans à l’échelle planétaire »…

Isabelle Stengers. À La Nouvelle-Orléans, on savait qu’un ouragan comme Katrina ­pouvait venir et que les digues ne tiendraient pas. On ­savait, mais on n’a rien fait. Comme nous ­savons aujourd’hui. Et quand Katrina est venu, en août 2005, les riches qui pouvaient s’enfuir l’ont fait, les autres sont restés, laissés à eux-mêmes. C’est ce qui est en train d’arriver à l’échelle planétaire : malheur aux vaincus, c’est-à-dire aux pauvres.

Votre propos est sous-titré « Résister à la barbarie qui vient » en référence à l’alternative de Rosa Luxemburg : « Socialisme 
ou barbarie ». Est-ce en ces termes que 
vous envisagez la possibilité d’un avenir ?

Isabelle Stengers. Lorsque la guerre de 
1914-1918 a éclaté, les prolétaires y sont allés, ils sont morts sur le champ de bataille avec aux lèvres un chant d’esclaves, écrit Luxemburg. C’est pour cela qu’elle crie que le socialisme n’est pas garanti, que la barbarie est une possibilité réelle. Nous sommes un peu dans la même situation. Tout le monde connaît les méfaits de la guerre économique de tous contre chacun. Et pourtant, on s’active en reprenant en chœur le refrain de la compétitivité glorieuse. « On sait bien, mais… » Un des « mais » les plus redoutables, c’est celui qui affirme que « les gens espèrent seulement tirer leur épingle du jeu, ils sont égoïstes et aveugles ». Or, il faut l’affirmer : nous ne savons pas de quoi « les gens » sont capables, car ils sont issus d’une opération de destruction systématique de leur pouvoir d’agir et de penser, c’est-à-dire de poser les problèmes qui les concernent collectivement. Le capitalisme, ce n’est pas seulement l’exploitation, c’est aussi, et même peut-être d’abord, l’expropriation, et cela depuis cette expropriation historique des « commons » en Angleterre, quand les paysans sans terre ont été jetés sur les routes. Une culture pratique de la vie ensemble a été détruite. Cette expropriation continue de plus belle aujourd’hui, au nom de la rationalisation, du gain de temps, de la nécessité de contrôler. Nous ne sommes pas impuissants, nous sommes réduits à l’impuissance.

Selon vous, « l’emprise du capitalisme » s’établit à partir d’« alternatives infernales » ?

Isabelle Stengers. Les alternatives infernales, c’est ce qui s’est déployé depuis que le progrès a perdu son pouvoir de mobiliser. Cela peut se résumer par : « Vous agissez pour une chose mais les conséquences seront pires. » Ainsi, « vous luttez pour un niveau de vie correct mais cela implique qu’il y aura des délocalisations », ou encore « vous voudriez plus d’équité par l’impôt mais cela va entraîner des fuites de capitaux ». Vous êtes comme pris à la gorge, réduit à ­l’impuissance. Et quand vous ­interrogez : « Oui, mais alors quoi ? », la seule réponse est : « Il faut lutter pour la croissance. » Avec ­Philippe ­Pignarre, dans la Sorcellerie ­capitaliste, nous avons décrit le montage de ces alternatives comme une attaque « sorcière » qui capture les puissances d’agir, d’imaginer, d’exister et de lutter.

Vous déconstruisez aussi bien les « lois 
du marché » que la « gouvernance » de 
« nos responsables »… Quel rôle l’État joue-t-il ?

Isabelle Stengers. Entre l’État moderne et le ­capitalisme, il faut faire une distinction. L’un n’est pas le reflet de l’autre. Il y a plutôt une sorte de pacte asymétrique qui définit ce que, à chaque époque, l’État laisse faire au ­capitalisme et ce que le capitalisme fait faire à l’État. Avec le néolibéralisme, il y a eu redéfinition de ce pacte sous le signe de la dérégulation. Nos ­politiques se sont défaits de tous les leviers qui leur ­permettaient d’agir au profit d’institutions non élues, apolitiques au service de la croissance, de la compétitivité, de la libre circulation des capitaux, etc. L’État n’en disparaît pas pour autant, mais il devient notre contremaître, chargé d’éviter la panique, l’insoumission, la démobilisation. Les politiques se prétendent « responsables », mais ils le sont seulement de nous, de ce que nous restions « motivés ».

Les « anticapitalistes doivent être capables 
de faire exister un autre possible ». À partir 
de quels leviers le peuvent-ils ?

Isabelle Stengers. Je ne suis pas d’un optimisme fulgurant. Pourtant, je constate que depuis dix ans il y a des luttes d’un style nouveau. Le combat contre les OGM a, par exemple, recréé une pensée politique au sujet du type d’agriculture et du monde que nous sommes en train de construire. Il a su relier des paysans, pour qui les OGM sont une nouvelle expropriation, des anticapitalistes en lutte contre l’emprise des brevets, des scientifiques alarmés par les conséquences. Ils ont appris les uns des autres et c’est pour cela que le mouvement est parvenu à faire bafouiller ce qui se proposait comme un progrès incontestable. Depuis, l’insoumission s’enrichit, s’empare de nouvelles questions. Le caractère inventif de ce genre d’alliance, qui crée des ­complicités, des connivences, des capacités neuves de résister là où le capitalisme divise – fait s’opposer les syndicats et les défenseurs de l’environnement, par exemple – me semble plus prometteur ­aujourd’hui que le « tous ensemble » qui donne à l’ennemi le pouvoir de choisir le point ­d’affrontement. Il nous faut des expériences de co-apprentissages mutuels afin de créer des causes communes multiples et mobiles, des solidarités de lutte contre le sentiment d’impuissance que fabriquent les divisions installées.

C’est ce que vous nommez 
la réappropriation ?

Isabelle Stengers. Se réapproprier, ce n’est pas seulement lutter contre l’exploitation, pour la redistribution des richesses produites. C’est guérir des effets de l’expropriation, ­redevenir capable d’affirmer et de lutter pour ce à quoi on tient. C’est la condition de ce qu’on ­appelle parfois une intelligence ­collective, ­chacun apprenant à penser par, grâce et avec les autres.

Le collectif est puissant de ce qu’il est ­multiple, de ce qu’il invente des manières de poser les problèmes dont chacun, isolément, serait incapable. Les activistes américains ont beaucoup appris à ce sujet, car ils ont compris que cette réappropriation ne peut attendre la « révolution », elle doit faire partie de la lutte elle-même.

Évoquant « l’intrusion de Gaïa », vous parlez 
de « situations qui produisent de l’égalité ». Peut-on y voir l’élaboration d’alternatives 
de progrès ?

Isabelle Stengers. Ce que j’ai nommé Gaïa fait intrusion au sens où elle met au défi nos ­catégories de pensée. Certains ont considéré que la Terre était une ressource à exploiter, d’autres qu’il fallait la protéger, mais on ne l’a jamais envisagée comme pouvoir redoutable, qui pourrait nous détruire, et à bref délai ! Ce constat change énormément de choses. Il ne s’agit plus d’exploiter ou de protéger mais d’apprendre à faire attention. Et pour de bon ! Les menaces de désordre climatique ne vont pas rentrer dans leur boîte, les humains doivent désormais composer avec ce pouvoir que leurs activités ont activé. Or apprendre à faire attention, c’est précisément ce que la version étatico-capitaliste du progrès nous a désappris. Mais cela demande d’apprendre à penser une situation dans toutes ses dimensions, avec toutes ses conséquences. À cet effet, nous avons besoin que cette situation « produise de l’égalité », qu’elle réunisse tous ceux qui sont concernés par elle et qu’ils soient tous habilités à faire valoir leur savoir ou leur expérience. C’est ce que nous avons désappris en donnant le pouvoir aux experts, mais le réapprendre demande l’invention de dispositifs opérants 
– l’égalité ne doit pas être formelle, elle doit être effective. Ce type d’invention est très différent des innovations techniques qui séparent plutôt les gens. Ici, il s’agit de susciter de la confiance en soi et dans les autres, de la lucidité, de la capacité d’échapper aux évidences toutes faites. Mesuré en termes de telles inventions, on aurait une tout autre définition du progrès !

Dans Une autre science est possible !, 
vous prônez une « slow science ». 
De quoi s’agit-il ?

Isabelle Stengers. Depuis que la recherche publique a été redéfinie en « économie de la connaissance », les liens de coopération critique se sont dissous. La réussite s’évalue maintenant à partir du brevet, mais cela n’a rien d’une réussite scientifique. Le capitalisme est en train de se retourner contre les chercheurs et de les détruire, après tant d’autres. Mais parler de « slow science » ce n’est pas seulement revendiquer « le temps et la liberté pour poser des problèmes qui en valent la peine ! ». Il s’agit aussi que les chercheurs deviennent capables de nouer d’autres liens que ceux, traditionnels, qu’ils ont avec l’industrie et l’État. Même s’il y a toujours eu des tireurs de sonnette d’alarme, l’institution scientifique a bel et bien promu un mode de développement que nous savons radicalement insoutenable. Les chercheurs ont l’habitude de mépriser l’opinion, de penser que c’est de la science que viendra la solution rationnelle aux problèmes de société. Une autre science est possible, mais elle exige ce qui est aujourd’hui pour eux une « perte de temps » : se réapproprier l’imagination nécessaire pour s’ouvrir aux préoccupations des autres, à leurs savoirs, à leurs objections. Ce n’est pas d’une meilleure information du public que nous avons besoin, mais de scientifiques capables de participer à une intelligence collective des problèmes.

Selon vous, le couplage entre lutte politique 
et création donne une capacité nouvelle 
qui procure de la joie. Est-ce cela être 
« de gauche » ?

Isabelle Stengers. Selon Gilles Deleuze, il existe une différence de nature entre gauche et droite. La gauche a besoin de manière vitale que les gens pensent. Cela ne veut pas dire qu’ils fassent des théories, mais qu’ils prennent en main ­collectivement les affaires qui les concernent. Au XIXe siècle, c’est ce qu’a fait la classe ouvrière lorsqu’elle a créé les mutuelles, les bourses du travail. La droite a besoin, elle, que les gens acceptent l’ordre établi, peu importe lequel, du moment qu’ils le respectent. Les dispositifs qui produisent de l’égalité sont donc « de gauche ». Ce qu’ils demandent est parfois dur, mais apprendre ensemble à être à la hauteur du problème posé, à ne pas le soumettre à des généralités est un événement créateur de joie. Lorsque des voix jusque-là étouffées et disqualifiées, réduites à des grognements, sont transformées en savoirs articulés, le problème devient meilleur à poser. Des alliances inattendues deviennent possibles. Ce qui nous menace est la division et le ressentiment : la joie est le contraire du ressentiment, et c’est elle qui peut être communiquée à d’autres. Il faudrait la faire sentir par des récits montrant comment des catalyses, des entraînements et des ouvertures d’imagination ont vu le jour alors que tout semblait bloqué : « Si c’est possible là alors cela peut l’être ici ! »

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4 août 2013 7 04 /08 /août /2013 10:10

 

                                                                         MARE NOSTRUM-copie-1

 

 

 source:Baladi

 

« Nés libres, nous le resterons »

Soutenir la lutte des prisonniers détenus dans les geôles sionistes



Août 2013 : N°17
 
L’Autorité palestinienne a réclamé la libération des 104 prisonniers palestiniens détenus avant les accords d’Oslo, avant de reprendre les négociations avec l’entité sioniste, sous l’égide américaine. Ce fut la position de principe, qui signifie que le déroulement de ces négociations reste indépendant de la libération des prisonniers. Mais les pressions américaines sur l’Autorité ont finalement abouti à plusieurs reculs concernant ce dossier, le recul le plus important, et qui vide tout le dossier de son contenu national, a été d’accepter que la libération des prisonniers soit un enjeu dans les négociations, et non plus un préalable indépendant. En clair, les prisonniers ne seront libérés que si les négociations avancent. On nous annonce déjà à grands cris que 35 prisonniers palestiniens détenus avant Oslo seront libérés, dans un geste de « bonne volonté »… Et l’Autorité s’est tue, et le ministère chargé des prisonniers de l’Autorité de Ramallah semble oublier qu’il avait refusé, il y a plusieurs semaines, que cette libération soit marchandée et qu’elle soit livrée par tranches, sur une durée de 9 mois.
Alors que les prisonniers palestiniens des territoires occupés en 48 et de la ville d’al-Quds craignent que de nouveau, l’Autorité palestinienne ne les abandonne, comme l’a fait la direction de l’OLP lors des accords d’Oslo, rien ne semble présager de bon, ni pour eux, ni pour d’autres prisonniers appartenant à des formations politiques et militaires « radicales ». Sachant que la question des prisonniers est une question prioritaire pour le peuple palestinien, les sionistes ont accentué la répression dans les prisons et multiplié les arrestations. Gageons que beaucoup de ces nouveaux kidnappés seront sur les listes des « prisonniers à libérer, au cours des négociations, ce que les sionistes et leurs amis américains vont présenter comme « un geste de bonne volonté » ! Une mystification de plus et l’Autorité Palestinienne ne fera rien pour la dénoncer….

Cependant, la grève de la faim menée par les prisonniers palestiniens détenus dans les prisons sionistes dérange ! Même si cette lutte est menée par seulement quelques prisonniers que le monde entier semble oublier !  Mais elle dérange tellement l’occupant qu’il envisage de promulguer une loi lui permettant de nourrir de force les prisonniers. Cet occupant oublie ou fait semblant d’oublier qu’il a déjà commis ce crime, même sans loi, envers trois  prisonniers grévistes de la faim : le martyr Abdel Qader Abul Fahem, le 11 mai 1970, lors de la grève de la faim menée par les prisonniers dans la prison de Ascalan, le martyr Rassem Halawe, de Jabalya le 20 juillet 1980 et le martyr Ali Jaafari, de Nablus, le 24 juillet 1980, au cours de la grève de la faim menée par les prisonniers dans la prison de Nafha. Mais la mascarade des sionistes se poursuit : ils auraient besoin de lois pour tuer, comme ils ont eu besoin de lois pour voler les terres, pour démolir les maisons, pour expropier les Palestiniens de leur pays. Le pire, ce sont les médias qui oublient les crimes passés et ne parlent que des menaces en prévision.

1 - Solidarité avec les prisonniers jordaniens en grève de la faim 
L’état de santé des 5 prisonniers jordaniens qui mènent la grève de la faim depuis le 2 mai 2013 s’est nettement détériorée : Mohammad Rimawi, Hamze Osman, Mounir Mar’i, Alaa Hamad et le dirigeant des Brigades al-Qassam, Abdallah Barghouty sont toujours en grève de la faim. Ils ont déclaré qu’ils ne cesseront leur mouvement que lorsqu’ils atteindront ou la liberté, en Jordanie, ou le martyre.
Le combattant prisonnier Abdallah Barghouty décrit la détérioration de son état de santé, disant que les veines sont bouchées et que le glucose ne passe plus dans le corps. Il dit souffrir de maux terribles à la tête et que les reins ont cessé de fonctionner. Pendant son séjour à l’hopital, il est toujours attaché au lit. Il est surveillé par plusieurs policiers sionistes, qui le fouillent 6 à 7 fois par jour.
Les familles des prisonniers « jordaniens » poursuivent leur mobilisation, pendant ce mois de Ramadan. Elles ont organisé des sit-ins devant le palais royal, et précisément lorsque la famille royale recevait les dignitaires et ambassadeurs arabes pour la rupture du jeûne.

14 prisonniers grévistes de la faim dans les prisons de l’occupation
Au premier août, outre les cinq combattants prisonniers jordaniens, détenus dans les prisons de l’occupation, qui mènent la grève de la faim depuis le 2 mai
Les prisonniers en lutte sont
 1 - Ayman Hamdan, de Beit-Laham est en grève depuis le 28 avril 2013. Il a été transféré à l’hopital, où il fut attaché au lit. Protestant contre les mauvais traitements, il cesse de boire de l’eau.
2 - Imad Batrane, de la ville d’al-Khalil est en grève de la faim depuis le 7 mai 2013. Le tribunal de l’occupation a confirmé sa détention « administrative ». Transféré à l’hopital, il est attaché au lit, malgré son état de santé.
3 – Ayman Itbich, en grève de la faim depuis 72 jours.
4 – Adel Harbiyat, en lutte depuis 72 jours.
5 – Adel Aalayn, en grève de la faim depuis 51 jours.
6 - Hussam Matar, 25 ans de la ville d’al-Quds, est en grève de la faim depuis deux mois. Il réclame le statut de « prisonnier de guerre ». Il est condamné à la perpétuité et détenu dans la section de l’isolement dans la prison de Ascalan.
7 – Abdel Majid Khdayrat, en lutte depuis 23 jours.
8 - Mohammad Itbiche, frère de Ayman, est toujours en grève de la faim depuis le 12 juin dernier en solidarité avec son frère. Il fut sauvagement battu par les geoliers dans la prison de Ofer. Il fut transféré à la prison de Meggido puis au centre d’interrogatoire et prison de Jalame. Mohammad a été arrêté le 8 juin 2012, il est condamné à 18 mois de prison, après avoir été détenu « administratif » pendant deux mois et demi.
9- Nahed al-Aqraa, en grève de la faim depuis 7 jours. Malade, il est détenu et attaché dans la prison de Ramleh.
Le tribunal de l’occupation a refusé les deux appels présentés au nom des prisonniers Adel Huraybat (38 ans et Ayman Itbich (33 ans), cadres du mouvement du Jihad islamique dans la ville d’al-Khalil, et en grève de la faim depuis leur arrestation le 23 mai dernier, contre la décision de leur détention « administrative ».
 
 
1 – Abolir la détention « administrative »

Les forces de l’occupation ont confirmé la détention « administrative » de sheikh Nazih Abu Aoun, 51 ans, de Jabaa, au sud de Jénine. L’occupation avait arrêté Abu Aoun le 5 novembre 2011, puis transféré en détention « administrative » sans aucun motif, puis renouvelé la détention. Sheikh Nazih Abou Aoun se trouve à présent dans la prison de Haddarim.
La détention « administrative » de Ahmad Qatamesh, professeur d’université et écrivain, a été renouvelée par l’occupation pour 6 mois. Le militant Ahmad Qatamesh se trouve détenu à cause de ses opinions politiques. C’est le shabak lui-même qui a décidé son maintien en prison, alors qu’il devait être libéré le 29 septembre prochain, après deux ans de détention.
  
2 – Libérer les prisonniers malades

La campagne pour la libération du prisonnier Mu’tassam Raddad, atteint de cancer, se poursuit. Mu’tassam est enfermé dans la prison de Ramle, où se trouve un soi-disant hôpital pour les prisonniers. Mais les conditions de détention sont bien pires que dans les autres prisons.
D’autres prisonniers palestiniens gravement malades attendent que l’opinion internationale s’en soucie quelque peu : Nabil Moughir, Mohammad Mardawi, Sami Aridi, Mansour Mouqada, Murad Abu M’ayleq, Nahed al-Aqraa….
 
3 – Répression

Un enfant de 5 ans, de la ville d’al-Khalil, a été arreté par l’occupation sioniste.
Les tribunaux de l’occupation ont condamné les responsables maqdisis, Mohammad Tawtah (député) et Khaled Abou Arfa, ancien ministre, à 30 mois de prison et un an de sursis. Mohammad Tawtah avait été arreté le 23 janvier 2012, au cours d’un sit-in au siège du CICR, protestant contre la suppression de sa « carte de résidence » dans la ville d’al-Quds, suite à son arrestation, en tant que député.
L’occupant maintient en isolement le prisonnier malade, Bassam Ubayd, de ‘Arraba dans la province de Jénine, dans la prison de Ramon, depuis 39 jours. Bassam Ubayd avait refusé la politique des transferts permanents pratiquée par l’occupant, pratique visant à déstabiliser les prisonniers. Bassam Ubayd est détenu dans les prisons sionistes depuis 9 ans.
Une unité spéciale de répression a mené un raid nocturne dans la section 8 de la prison du Naqab le jeudi premier août. Plusieurs prisonniers ont été blessés.
Des dizaines de Palestiniens, dans les territoires occupés en 48 et en 67 (al-Quds surtout) ont été arrêtés par les forces de l’occupation, lors des journées de la colère contre le Plan Prawer, qui vise les Palestiniens du Naqab. La plupart ont été relâchés. De son côté, les forces sécuritaires de l’AP ont arrêté plusieurs militants du FPLP ayant manifesté contre la reprise des négociations entre l’AP et l’occupant sioniste. La répression des manifestants fut sauvage. Pendant ce temps, l’AP encourage la collaboration de citoyens palestiniens avec les colons sionistes, pour montrer son « désir de paix »…
 
 
4– Libération

Deux prisonniers maqdisis ont été libérés le 9 juillet, Kifah Ibrahim Serhan (43 ans) et Fouad Akram Hamdiyyé (44 ans), avant d’etre expulsés hors de leur ville. Ils ont été détenus pendant 20 accusés d’appartenir au mouvement Hamas. Kiaf Serhan a été assigné à résidence dans la ville de Kfar Manda, en Galilée, et Fouad Hamdiyyé dans le village d’Abu Ghosh.
Le résistant Khodr Rayess, membre du FPLP, a été libéré après 11 ans de prison, aux cours desquelles il a été enfermé dans toutes les prisons de l’occupation. Il était étudiant à Biz Zeit, lors de son arrestation et devait obtenir son diplome juste quelques heures avant son arrestation.
Le résistant membre du FPLP Ahmad ‘Weyni du camp al-Burj dans la bande de Gaza a été libéré après 12 ans de détention.
Le résistant Atef Wraydat (47 ans) de la ville d’al-Khalil libéré après 11 ans et trois mois de détention dans les prisons de l’occupation. Il fut arrêté la première fois en 1982 alors qu’il avait juste 16 ans, et fut condamné à 11 ans de prison. Représentant du Fateh dans les prisons, il fut libéré le 10 août 1993 pour rejoindre les forces de la sécurité présidentielle. Il rejoint les Brigades al-Aqsa (branche armée du mouvement Fatah) et pendant deux ans, il passe en clandestinité, et est recherché par les forces de l’occupation. Il est arrêté le 3 mai 2002 et condamné à 11 ans et trois mois de détention. En 2011, il mène la grève de la faim, pendant 50 jours, en compagnie du prisonnier martyr Maysara Abu Hamdiyé, pour protester contre la politique de négligence médicale suivie par l’occupant.
Le résistant Ahmad Sawalma, du camp de Balata, a été libéré après 10 ans de détention.
 
 
5 - Statistiques

220 Palestiniens ont été arrêtés au cours du mois de juillet, au cours de raids de l’armée et des forces sécuritairs sionistes dans les territoires occupés, dont 60 dans la seule ville d’al-Khalil. 35 enfants ont été arrêtés au cours de ce mois, le plus jeune étant Wadih Meswada, d’al-Khalil, âgé de 5 ans. 3 femmes ont été arrêtées, dont Fathia Hussayn, qui manifestait dans le Naqab contre la loi Prawer, le 15 juillet dernier. Mohammad Abu Tir, député d’al-Quds et expulsé vers Ramallah, a été kidnappé puis mis en détention « administrative ».
5100 prisonniers sont détenus dans les prisons sionistes, dont 537 condamnés à la perpétuité ; 250 enfants sont détenus dans la prisons de Hasharon, Meggido et Ofer (camp militaire). 104 prisonniers sont détenus avant les accords d’Oslo, les plus anciens étant Karim Younes, Issa Abd Rabboh et Huza’ Saadi. 1400 prisonniers souffrent de maladies graves ou chroniques, ou de blessures non soignées, parmi eux Mu’tassam Raddad, Mahmoud Abou Saleh et Khaled Shawish, tous détenus dans la prison de Ramleh. 14 prisonniers libérés en octobre 2011 en contrepartie de la libération du soldat sioniste français, ont été à nouveau arrêtés et sont sous la menace de devoir purger leurs « peines » antérieures.

7 – Enlèvement

Les autorités de l’occupation ont enlevé, au cours de la dernière semaine du mois de juin, le Palestinien Wael Abu Rayda, alors qu’il se trouvait dans la ville égyptienne de Rafah, et qu’il voulait se mettre en route vers le Caire, avec sa famille. Abu Rayda (35 ans) est originaire de la bande de Gaza.  Sa famille avait annoncé son enlèvement, juste à ce moment, mais son enlèvement n’a été confirmé que récemment, par les autorités sionistes, qui le détiennent depuis le 21 juin. Elles ont interdit la publication de toute information à son sujet, pendant 51 jours, et semblent vouloir l’emprisonner pour « crimes sécuritaires ».
 
8– Solidarité

Geste de solidarité exemplaire : plusieurs maqdisis ont rompu le jeûne avec du sel et un peu d’eau, en solidarité avec les prisonniers en lutte, qui mènent la grève de la faim, et dont c’est l’aliment depuis plusieurs mois, pour certains. Les jeunes maqdisis qui ont ainsi affirmé leur solidarité avec les prisonniers en lutte ont tenu à se retrouver devant le siège du CICR, dans sheikh Jarrah.
Des manifestations ou sit-ins quotidiens se déroulent en Cisjordanie et à Gaza, et des meetings en Palestine occupée en 48, en soutien aux prisonniers grévistes de la faim ou aux prisonniers malades, pour exiger leur libération. Les familles des prisonniers participent à toutes ces activités. Les dernières actions se sont déroulées dans la ville de Jénine et dans la ville de Nablus.
L’association européenne U-Free (consacrée aux prisonniers palestiniens) a lancé plusieurs campagnes de solidarité, notamment avec le prisonnier toujours isolé, Darrar Abu Sissi, que l’occupant accuse d’avoir développé les fusées en possession de Hamas.
L’écrivain et journaliste « israélien » Gidéon Levy, a réclamé la libération des prisonniers palestiniens des territoires occupés en 48, détenus avant les accords d’Oslo, mettant en avant la discrimination dont fait preuve l’Etat sioniste envers eux, en comparaison avec les prisonniers juifs.
 
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