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CHANTS REVOLUTIONNAIRES

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17 février 2018 6 17 /02 /février /2018 20:33
REMUE-MENINGES:"Il n'existe pas de personnes blanches, seulement des décolorées!"
Yves Coppens: "Il n'existe pas de personnes blanches, seulement des décolorées!"
Propos recueillis par Julien Bisson, publié le
 
"Un scientifique à qui vous dites qu'une expérience est possible, mais qu'elle peut être néfaste, ne reculera jamais" assure Yves Coppens.
"Un scientifique à qui vous dites qu'une expérience est possible, mais qu'elle peut être néfaste, ne reculera jamais" assure Yves Coppens.REUTERS/Charles Platiau

A l'heure où les questions s'accumulent autour du clonage, du transhumanisme, mais aussi de l'origine de l'homme et de la nature des races, il était grand temps de consulter le paléontologue Yves Coppens et d'arpenter, à ses côtés, les pistes qui mènent aux derniers secrets de la préhistoire.

Volontiers iconoclaste, Yves Coppens reste un passeur impénitent, qui multiplie les conférences et les ouvrages de vulgarisation - trois en quelques mois, dont le recueil de chroniques radio Des pastilles de préhistoire, quatrième volet de sa série à succès Le Présent du passé.  

[Extraits. Retrouvez l'intégralité de l'interview d'Yves Coppens dans le mensuel Lire de février, en kiosques.] 

 
 

On imagine que vous n'êtes pas un franc partisan de l'idée d'une "race blanche"...  

Ah non, c'est certain! Vous savez, nous venons tous d'une même espèce, née dans les forêts africaines tropicales. Pour amuser, je dis souvent qu'il n'existe pas de personnes blanches, seulement des décolorées! Ça en fait rire certains, pas d'autres...  

D'où viendront les découvertes de demain?  

Sans doute de la paléogénétique. De ce côté-là, la recherche a accompli des progrès considérables. Il n'y a pas si longtemps encore, le grand pape de la discipline, Svante Pääbo, me disait que, au-delà de 500000 ans, il avait de la peine à retrouver et à lire des brins d'ADN. Maintenant, il est passé au million d'années, donc c'est déjà mieux. Mais c'est une science encore balbutiante, qui donne parfois des grands coups de trompettes un peu trop rapides, avant de se rétracter.  

LIRE AUSSI >> Aux origines de l'homme, du nouveau  

On s'est aperçu par exemple que sur certains brins d'ADN, des virus prenaient la place des nucléotides, donnant des résultats falsifiés. Il n'empêche que les progrès de la paléogénétique vont nous aider pour établir les filiations entre les espèces humaines. Pas pour Lucy cela dit, dont on n'a retrouvé aucun brin d'ADN! Je pense aussi à la compréhension des migrations, depuis la première sortie d'Afrique jusqu'au peuplement de la planète entière. C'est une science en plein développement, qui nous rend même un peu jaloux: jusque-là, les paléontologues avaient l'hégémonie sur le temps, et nous voilà en compétition avec d'autres scientifiques en blouse blanche!  

Les morceaux du squelette de Lucy conservés au Muséum national d'Ethiopie à Addis-Abeba.
Les morceaux du squelette de Lucy conservés au Muséum national d'Ethiopie à Addis-Abeba.C. Commons

On parle même de cloner un mammouth dans les prochaines années. Finalement, la préhistoire, c'est l'avenir?  

La préhistoire peut renaître, oui. Avec le clonage, on peut imaginer la renaissance de bestioles ou de plantes qui ont disparu. J'ai une collègue russe qui a sorti des graines du permafrost, mises de côté par un écureuil il y a 30000 ans. Ce petit écureuil avait fait sa réserve, qu'elle a entièrement replantée et qui lui a permis de faire pousser cette plante préhistorique. Même si, en 30000 ans, sur le plan botanique, il n'y a pas de transformations radicales, c'est un début impressionnant.  

Il y a 30000 ans, l'homme de Neandertal parcourait encore la planète...  

Oui, et c'est bien cela qui m'intéresse! Je travaille actuellement en Sibérie, justement dans l'espoir de trouver un cadavre humain aussi vieux que cela - un Homo sapiens mort il y a 20000 ans, ou, avec un peu de chance, un Neandertal mort il y a 50000 ans. Il y a des mammouths aussi anciens que ça. On a un jour découvert un bébé mammouth qu'on a appelé Khroma, qu'on a disséqué et autopsié dans une des salles de l'hôpital du Puy-en-Velay. Et nous avons trouvé le lait de sa mère dans son estomac. Donc on peut encore mettre la main sur des reliques du passé intéressantes.  

Cela suffirait pour cloner un mammouth?  

Un membre de l'équipe de Svante Pääbo a trouvé comment recoudre des nucléotides manquants. Alors évidemment, si on ajoute les brins les uns aux autres, ça ne fait pas un ADN complet, ce n'est pas aussi simple que ça. Cela étant dit, à partir du moment où on sait fabriquer les nucléotides manquants, la perspective du clonage ne paraît plus tout à fait éloignée...  

Demain, le mammouth. Après-demain, qui sait, l'homme de Neandertal... Est-ce que ça ne pose pas des problèmes éthiques?  

On ne connaît pas encore les limites de la génétique, ce qui effraie certaines personnes. Pour ma part, je ne comprends pas lorsqu'on me dit que cela peut poser des problèmes éthiques. Bien sûr, il est important d'avoir un oeil sur l'usage que l'humanité fait de ses progrès. On m'a dit qu'il fallait mettre en place un comité de scientifiques. Surtout pas! Un scientifique à qui vous dites qu'une expérience est possible, mais qu'elle peut être néfaste, ne reculera jamais. Moi-même, si j'en avais la possibilité, je serais tout à fait capable de me lancer dans le clonage d'un homme préhistorique.  

Des pastilles de préhistoire: le Présent du passé IV par Yves Coppens, 192p., Odile Jacob, 22,90€
Des pastilles de préhistoire: le Présent du passé IV par Yves Coppens, 192p., Odile Jacob, 22,90€Odile Jacob

"Ce qui a un sens a du sens", écrivez-vous dans Devenir humains (Autrement). L'histoire de l'homme a-t-elle un sens? 

Oh, vous savez, la science est froide! Il n'y a pas d'histoire confessionnelle là-dessous. Mais ce qu'on peut constater, c'est que l'Univers commence à être perçu il y a 14 milliards d'années, l'homme il y a 3 millions d'années, et que ce dernier incarne l'état le plus compliqué de la matière qu'on connaisse. Donc il y a un sens, qui va vers la complication et l'organisation.  

D'où provient ce mouvement? Vers où va-t-il? On n'en sait rien. La science, dans ces cas-là, aime dire: "C'est une question ouverte." C'est une élégance qui me convient bien. Si d'autres planètes se trouvent à distance adéquate de leur soleil, et s'avèrent en condition de conserver leur atmosphère et leur eau, on peut imaginer qu'il y ait là la reproduction de ce même mouvement de complication, sans en être la réplique identique, car l'évolution est le fruit de hasards et de choix. Ce serait donc fascinant de découvrir d'autres êtres complexes sur ces autres planètes.  

Comment voyez-vous l'avenir de l'homme?  

Pour le moment, l'avenir de l'humanité, sur le plan technologique, est somptueux. On comprend les choses de mieux en mieux, même s'il restera toujours des mystères. On parle de mutations génétiques, de transhumanisme. On commence aussi à se balader dans l'espace, on envisage de conquérir Mars. On n'y est pas encore, mais ça avance. Et ça me passionne. Si on colonise Mars dans quelques milliers d'années, alors cela signifiera que nous serons devenus une autre espèce, voir un autre genre. Et donc que la diversité que nous avons perdue sur Terre, de par la démographie et la circulation, pourrait renaître, sous la forme d'une diversité astronomique.  

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15 février 2018 4 15 /02 /février /2018 17:53
2 min

"Emmanuel Macron concède pour la première fois à dire publiquement les conditions de son accession au pouvoir. « Je suis le fruit d’une forme de brutalité de l’Histoire », d’une « effraction ». La légende d’un programme voté par une majorité de Français s’étiole devant l’évidence."
l'Humanité du 15
février 2018

 

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12 février 2018 1 12 /02 /février /2018 15:53
14 min
 
 
 
Collectif Avà Basta

Communiqué du Collectif antiraciste AVA BASTA
suite à la publication « Di L’Altu Pianu »

« Qu’un texte pareil ait pu paraitre, où que ce soit, constitue une ignominie repoussante,non seulement, pour Madame ERIGNAC mais pour toutes les femmes, en général.
On ne répondra, en aucune façon, aux termes délirants de cette vomissure, mais il nous faut réaffirmer que des millions d’hommes et de femmes ont souffert de l’occupation nazie, pas seulement dans le quotidien de leurs familles ou pas seulement parce que le hasard les a fait naître à Auschwitz.
Des femmes ont pris délibérément les armes, dans la résistance notamment, et ont payé leur engagement, parfois dans de grandes souffrances et dans la mort.
Tout être humain doit être traité avec respect ce qui n’empêche pas de juger avec sérénité. » (Noëlle VINCENSINI)
Noëlle m’a demandé de conclure, ce sera simple :
A 17 ans, membre des jeunesses communistes et de l’Union des Femmes Françaises, Noëlle a été arrêtée et déportée. Elle a été tondue deux fois par les nazis.
La symbolique de son immense chevelure en porte témoignage.
AVA BASTA ne permettra à personne que la FEMME soit insultée par qui que ce soit ! »
Ghjiseppu MAESTRACCI

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12 février 2018 1 12 /02 /février /2018 12:48

 

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7 février 2018 3 07 /02 /février /2018 13:56

Une « communauté internationale » apathique

Soumis à un blocus israélien vieux de plus de dix ans, les millions de Palestiniens enfermés dans Gaza connaissent une situation dramatique qui ne soulève pourtant aucune indignation de la part de la « communauté internationale ». Et les mois à venir risquent d’être encore pires.

La matinée du 22 janvier 2018, les devantures des commerces de la bande de Gaza sont restées obstinément fermées, et dans l’après-midi les poings de centaines de ses habitants se sont levés avec colère en signe d’une ultime protestation contre la situation économique du territoire, à bout de souffle. Cette grève sera suivie trois jours après d’une nouvelle journée de mobilisation, faisant suite à la décision des États-Unis de geler 65 millions de dollars du budget annuel accordé à l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (Unrwa, United Nations Relief and Works Agency for Palestine Refugees in the Near East). Le 29 janvier, le scénario se répète, et c’est au tour du personnel des agences onusiennes présentes à Gaza de s’emparer des rues.

Si cette situation précaire n’est pas nouvelle, les soulèvements successifs marquent cependant un point de rupture pour l’enclave palestinienne qui, face à des conflits pléthoriques et une décennie de siège, menace de s’effondrer sous le poids d’une crise humanitaire sans précédent.

Autrefois clef de voûte de la politique palestinienne au nationalisme défiant, la bande de Gaza n’est plus que le point névralgique des querelles secouant la Palestine actuelle, scindée en deux entre le parti du Fatah de Mahmoud Abbas — à la tête de l’Autorité palestinienne (AP) — et le Hamas d’Ismaël Haniyeh, contrôlant Gaza depuis sa prise de pouvoir en 2007. À la polarisation constante des divisions viennent s’ajouter un blocus prolongé et des conflits successifs, menant à une impasse qui semble avoir atteint son acmé : une décennie après l’accession au pouvoir du Hamas, la situation est alarmante tant sur le plan économique que social.

Malgré plusieurs tentatives de réconciliation — menées sans grande conviction — la division administrative et politique n’a de cesse de se répercuter avec fracas sur la fragile économie du territoire gazaoui. Les accords du Caire en 2011, de Doha en 2012, et de « Beach Camp » en 2014 n’ont eu que très peu d’écho sur la lutte fratricide qui agite les deux camps, tandis que la création par le Hamas d’un comité administratif en mars 2017 a poussé le Fatah à durcir une fois pour toutes ses relations avec son rival, portant alors un ultime coup dur au maigre espoir d’unité nationale.

Camp de réfugiés d’Al-Shati
À la nuit tombée, les rues sont plongées dans le noir, obligeant les habitants à s’éclairer avec des lampes de poche, des phares de voiture ou des feux de bois.
© Chloe Sharrock /Ciric
L’électricité, enjeu de discorde

Au cœur de ces jeux de pouvoir constants, certaines denrées vitales deviennent alors un moyen de pression, non sans favoriser l’aggravation de la situation humanitaire déjà catastrophique. C’est ainsi qu’en juin 2017, l’AP décide de réduire de 35 % le paiement de l’électricité de Gaza versé habituellement à Israël, lequel ampute immédiatement de 60 mégawatt (MW) le courant injecté dans la bande. Le résultat ne se fait pas attendre : les habitants feront face à un déficit allant jusqu’à 21 heures de coupure de courant quotidienne. Il faudra attendre un nouvel accord, signé le 12 octobre 2017 sous l’égide de l’Égypte, pour que l’électricité soit rétablie. Pour Mohamed Thabet, porte-parole de la compagnie de distribution d’électricité de Gaza, la situation reste cependant foncièrement préoccupante :

Notre électricité provient de trois sources différentes : 120 MW d’Israël, 23 MW d’Égypte, et 50 MW de notre centrale électrique. En hiver, la demande s’élève à 600 MW de courant, mais nous n’en recevons qu’un tiers ! Et malgré les 60 MW supplémentaires d’Israël, nous n’aurons que 6 heures d’électricité par jour. Ce n’est pas suffisant, et les secteurs affectés sont nombreux : l’éducation, les systèmes de santé, l’aide humanitaire font face à de graves problèmes en raison de ces restrictions.

Le manque d’électricité est le point de départ d’une suite sans fin de conséquences socio-économiques. Les centrales d’épuration et de dessalinisation d’eau constamment à l’arrêt faute de courant précipitent Gaza dans un fossé où s’entremêlent problèmes environnementaux et sanitaires. Avec seulement 12 heures par semaine d’accès à l’eau et une nappe phréatique au seuil de l’épuisement, la population n’a accès aujourd’hui qu’à 5 % d’eau potable. En parallèle, 180 millions de litres d’eau usée sont déversés chaque jour dans la mer, menaçant l’instable écosystème rattaché au territoire.

Les structures de santé sont elles aussi dans une impasse critique puisque des milliers de vies dépendent d’équipements médicaux fonctionnant à l’électricité. Des solutions existent, dont les plus répandues sont les générateurs ou les batteries UPS, mais elles restent cependant insuffisantes et trop onéreuses. L’hôpital pour enfants Al-Doura a certes tenté d’installer des panneaux solaires sur son toit (un moyen également employé par la municipalité ou les commerçants les plus riches), mais l’investissement de départ est disproportionné en comparaison des résultats obtenus.

Quant aux générateurs, que l’on devine aisément au rugissement incessant provenant de la cour de l’hôpital Al-Chifa, l’une des plus larges structures de santé de Gaza, c’est jusqu’à 300 litres de fuel par heure qui sont nécessaires à leurs fonctionnements, soit un coût estimé à 4 000 dollars/jour (3 210 euros). Et, fonctionnant jusqu’à 20 heures quotidiennement alors qu’ils ne sont conçus que pour une moyenne de 8 heures, les engins menacent de lâcher à tout moment — une conséquence qui pourrait coûter la vie à des centaines de patients.

C’est l’air soucieux que le Dr. Ayman Al-Sahbani, chef des urgences de l’hôpital, s’exprime sur la situation :

C’est vraiment délicat, certains départements nécessitent de l’électricité 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, comme celui de la dialyse ou des soins néonataux intensifs, où plus de 150 nourrissons dépendent d’incubateurs pour être maintenus en vie. Nous sommes également obligés de repousser certaines opérations pour prioriser l’utilisation du fuel du générateur. De surcroît, les employés ne reçoivent pas leur salaire, et nous manquons de beaucoup de médicaments et d’équipement.

Dix ans de blocus

Le blocus imposé par Israël et l’Égypte vient en effet ajouter aux restrictions de courant une difficulté supplémentaire de taille : les réserves de médicaments s’épuisent et font face à un déficit de 35 %, tandis que les patients les plus malades peinent à obtenir une autorisation de sortie de territoire qui leur permettrait d’obtenir des soins adaptés. En parallèle, la fourniture de fuel est régulièrement victime de l’embargo. Une situation dont l’hôpital Beit Hanoun a fait les frais le 29 janvier dernier et qui l’a obligé à suspendre certains de ses services et transférer en urgence des centaines de patients vers un autre établissement.

Depuis 2007, suite à la prise du pouvoir par le Hamas, la circulation des biens comme des personnes s’est vue totalement limitée par la mise en place d’un blocus par Israël et l’Égypte, qui continue actuellement d’achopper toute possibilité de reconstruction économique. Pour le territoire, étiolé par les conflits et les tensions, ce blocus externe de longue date est ressenti comme une ultime sanction qui s’abat sur l’ensemble de la population. Entravant tout flux humain ou matériel et toute possibilité de sortie pour les habitants, il a valu à maintes reprises la qualification de la bande de Gaza de « prison à ciel ouvert ».

Les commerçants et marchands se trouvent désormais dans l’incapacité d’exporter leurs biens, ce qui représentait pourtant l’une des sources principales de revenus pour une grande partie de la population. Et tandis que le secteur privé a été mis à genoux par les restrictions drastiques à l’exportation, l’importation de nombreux matériaux de construction a été en parallèle interdite par Israël au motif qu’ils pourraient être utilisés à des fins militaires par le Hamas, notamment pour la confection d’armes. Gaza a ainsi souffert dès 2008, année suivant la mise en place du blocus, d’une baisse de 75 % du nombre de camions important de la marchandise dans le territoire. Et aujourd’hui encore, environ 5 000 biens sont retenus à la frontière parmi lesquels du bois, des câbles électriques, des ascenseurs ou des équipements médicaux.

Sud de Gaza
De nombreux immeubles détruits lors du conflit de 2014 n’ont pas encore été reconstruits.
© Chloe Sharrock /Ciric
Invivable en 2020 ?

La reconstruction est pourtant une absolue nécessité compte tenu des guerres consécutives qui ont ravagé les 360 kilomètres carrés du territoire. Actuellement plus de 30 000 personnes attendent toujours d’être relogées suite au conflit de 2014, durant lesquels 17 800 habitations ont été totalement détruites et 170 000 détériorées.

Par ailleurs, les conflits ont certes mobilisé l’aide de la communauté internationale, mais l’attention portée aux efforts de reconstruction intrinsèque aux conflits réguliers a inévitablement détourné l’attention d’autres projets de fond pourtant indispensables au développement économique de Gaza sur le long terme. Ils ont en parallèle tenu à l’écart des investissements qui auraient permis une réhabilitation structurelle de la société établie sur une base solide et résolument tournée vers l’avenir.

Face à cette impasse protéiforme qui joue les prolongations, il est difficile de ne pas penser au rapport publié par les Nations unies en 20 12, Gaza in 2020 : a Liveable Place ?, qui alertait déjà du risque que Gaza devienne inhabitable d’ici 2020 si aucune mesure concrète n’était prise. Gaza, 10 ans après, un autre rapport publié en juillet 20 17 par le United Nations Country Team in the occupied Palestinian territory (Unsco) vient faire écho à l’urgence de la situation qui engage Gaza dans une course contre la montre à l’issue de laquelle ne semble se dessiner aucun dénouement.

L’Unrwa, dernier rempart avant la catastrophe humanitaire

Alors que la population dépend entièrement des aides extérieures, avec notamment plus de la moitié des habitants vivant sous le seuil de pauvreté et en insécurité alimentaire, la décision des États-Unis en janvier d’amputer de 65 millions de dollars son aide à l’United Nations Relief and Works Agency (Unrwa) — l’Agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens — tombe comme un couperet alors que la situation atteint un point de non-retour. Un simple coup d’œil aux chiffres des infrastructures en place suffit à saisir l’ampleur de l’aide indispensable de l’Unrwa dans un territoire aussi afffaibli que Gaza : 267 écoles, 21 centres de santé, 16 centres de services sociaux et quasiment 12 500 membres du personnel. Quelque 8 camps de réfugiés, parmi les plus densément peuplés au monde, font également de la société gazaouie une population particulièrement vulnérable.

Au-delà des conséquences strictement financières, le gel de l’aide risque d’exacerber la rupture entre les différents acteurs du processus de paix du conflit israélo-palestinien, notamment l’AP et les États-Unis dont les relations se sont nettement détériorées suite à la décision de Donald Trump de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël.

Devant des bureaux de l’Unrwa
Un Gazaoui se réchauffe avec un grand feu devant un bâtiment de l’Unrwa.
© Chloe Sharrock /Ciric

Antonio Guterres, secrétaire général des Nations unies, a par ailleurs très justement souligné la dualité indissociable du rôle de l’Unrwa lors d’une conférence de presse donnée le 16 janvier 2018 à New York :

Les services [de l’Unrwa] sont d’une extrême importance, pas seulement pour le bien-être de la population (…), mais aussi — selon moi, mais également selon la plupart des observateurs internationaux dont certains sont Israéliens — comme un important facteur de stabilité. 

Une stabilité qui se montre pourtant menacée à l’heure actuelle, au moment où les désaccords récents et les accusations fusent de toutes parts. Pour le gouvernement israélien, l’Unrwa attise la haine contre les Israéliens et soutient le Hamas, qu’il considère comme un groupe terroriste. Pour les Palestiniens, le gel de l’aide est une concession de plus à Israël venant des États-Unis et une humiliation supplémentaire qui justifie leur refus de voir plus longtemps l’Amérique de Trump comme médiateur de paix légitime. Viennent s’ajouter à cela les démêlés opposants inlassablement les deux partis palestiniens, qui cherchent un terrain d’entente, sans résultat jusqu’à présent.

Une dynamique unitaire et une résolution du conflit intrapalestinien se placent pourtant comme conditions sine qua none d’un apaisement des tensions externes, avant de prétendre poser les fondations d’une paix durable dans la région. Ce n’est qu’en replaçant Gaza au centre des enjeux politiques internationaux qu’il sera possible d’ouvrir un dialogue concret avec les autres acteurs du conflit, et ainsi entrevoir une sortie de crise pour le territoire.

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7 février 2018 3 07 /02 /février /2018 09:47

Une bonne nouvelle, la victoire des Chibanis

image

 

TERRE CORSE.....

 

Chibanis signifie en arabe « vieux » ou « cheveux blancs ». Les Chibanis en France désignent les anciens travailleurs immigrés devenus retraités immigrés.


Les Chibanis, en majorité marocains,  anciens de la SNCF demandaient réparation pour différents préjudices (carrière, retraite, formation, accès aux soins, santé). Après plus de douze ans de procédure, la plupart des ressortissants marocains avaient obtenu gain de cause devant les prud'hommes en septembre 2015. Mais la SNCF avait fait appel de cette décision qui la condamnait à une forte somme de dommages et intérêts.

Ces travailleurs ont été embauchés entre 1970 et 1983 par la SNCF, majoritairement comme contractuels, et n'ont pas bénéficié du « statut » plus avantageux des cheminots, réservé aux ressortissants européens. La SNCF devra payer. Une injustice enfin réparée.

José FORT

 
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7 février 2018 3 07 /02 /février /2018 09:33
La CGT Retraité-e-s Haute Corse et la visite du Président

Écrits par vociaiaccini-ubloggu dans. Posté dans Reçu

 a reçu ……….

Mr  le Président, et  si  on partageait les richesses en  Corse comme dans tout le pays ?

En 10 ans le PIB de la Corse a été multiplié par 2. Mais qu’en est-il de nos revenus ?

Depuis 5 ans nos retraites sont bloquées et ce n’est pas la petite hausse de fin d’année qui comblera le manque à gagner. La hausse de la CSG qui s’applique ce mois de Janvier aux retraités, va encore accentuer les difficultés de beaucoup d’entre nous. En Corse, la moitié des retraités est au minimum vieillesse, le quart au-dessous du seuil de pauvreté, Nous avons le privilège d’être les plus pauvres, mais le nombre de foyers de me assujettis à l’impôt sur la grande Fortune, est passé de 800 à 1200 en moins de 5 ans.

  • Au niveau du logement social, il n’y a pas de programme qui puisse répondre a des besoins en forte hausse (en Haute Corse il manque 3600 logements sociaux)
  • Au niveau des prix, le carburant est toujours plus cher que sur le continent bien que le taux de TVA qui lui est appliqué soit réduit de près de 7%, Selon l’INSEE, les prix de l’alimentation sont plus élevés de 9% en moyenne, Pour les retraités de l’intérieur de l’île la situation est encore plus difficile,
  • Une prime de vie chère de 200 euros devient indispensable.
  • Au niveau de la santé, tous les services de santé sont en grande souffrance au détriment des salariés, de la population et tout particulièrement des retraités.  Le droit à la santé est un droit humain et non une marchand.ise.
En  Corse, un  plan  exceptionnel « SANTE «      doit  être  mis  en  œuvre  sans  délai.
  • Quant au problème des transports, nous exigeons que les 187 millions d’euros transférés au titre de la continuité territoriale, puissent également bénéficier, à tous les retraités de l’île,
A ce titre nous revendiquons toujours, pour tous les retraités, une réduction de 50% du prix appliqué

De l’argent, il y en a, en Corse. Alors partageons les richesses, pas la misère ; 200 euros pour les retraités ce n’est pas de trop !

 

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6 février 2018 2 06 /02 /février /2018 21:50
Corse. Macron dans le maquis constitutionnel
Grégory Marin et Lionel Venturini
Mercredi, 7 Février, 2018
L'Humanité
Après sa visite hier à Ajaccio, le président de la République doit prononcer, aujourd’hui à Bastia,
un discours sur sa vision de la Corse. Benoit Tessier/Reuters
Après sa visite hier à Ajaccio, le président de la République doit prononcer, aujourd’hui à Bastia, un discours sur sa vision de la Corse. Benoit Tessier/Reuters
 

Le chef de l’État doit aujourd’hui prononcer un discours sur l’avenir de l’île. Jusqu’ici, la vision de la République et la majorité des propositions nationalistes sont contradictoires.

Le président de la République a entamé hier un voyage de deux jours en Corse. Après un hommage le matin, dans la rue Colonna-d’Ornano, à Ajaccio, où le préfet Érignac a été assassiné il y a vingt ans par des militants nationalistes (lire ci-dessous), Emmanuel Macron devait consulter le soir l’autonomiste Gilles Simeoni, président de l’exécutif, et l’indépendantiste Jean-Guy Talamoni, président de l’Assemblée. Le duo nationaliste, déçu des premières discussions avec l’État, lui présentera à nouveau ses revendications, espérant le faire fléchir avant le discours sur sa vision de la Corse, qu’il doit prononcer à Bastia, aujourd’hui.

1 Quelles revendications de l’exécutif corse ?

Gilles Simeoni et Jean-Guy Talamoni estiment avoir reçu mandat des électeurs corses pour négocier avec l’État les fondamentaux de leur programme commun : mention du « peuple corse » dans la Constitution, autonomie « renforcée » qui permettrait de maîtriser la fiscalité avant une autonomie « de plein droit et de plein exercice » (y compris législative donc) promise sous dix ans, coofficialité entre les langues corse et française, statut de résident obligeant à cinq ans de location avant de se porter propriétaire d’un bien sûr l’île, rapprochement, voire amnistie, de tous les « prisonniers politiques ».

2Quelle traduction dans la Constitution française ?

Pour l’instant, le Conseil constitutionnel est prêt à admettre l’existence d’une collectivité territoriale spécifique, pas une autonomie comparable à celle de certains territoires d’outre-mer. Certes, « les principes d’unicité du peuple français et de la langue française » sont déjà « mis à mal » depuis la révision constitutionnelle de 2003, soulignait le constitutionnaliste Guy Carcassonne dans une étude de 2013. Pour obtenir ce qu’il veut, l’exécutif corse doit arracher une nouvelle révision. Dans un rapport remis à la collectivité de Corse, la professeure de droit public Wanda Mastor, Corse elle-même, suggère un article qui reconnaîtrait à l’île un statut spécifique, considérant que « l’autonomie interne d’une région », comme en Nouvelle-Calédonie par exemple, n’entraîne pas « la violation du principe d’indivisibilité de la République ». Le problème est que les « natios » réclament une autonomie « permettant de déroger dans certains domaines – foncier, fiscal, linguistique, institutionnel également », selon Jean-Guy Talamoni.

En théorie, il suffirait d’ajouter la Corse à la liste du titre XII de la Constitution (article 72-3), traitant « des collectivités territoriales », avec la Guadeloupe, La Réunion, Mayotte ou Saint-Barthélemy. Tous territoires d’outre-mer, loin du continent européen, souligne un autre constitutionnaliste, Bertrand Mathieu. L’insularité corse n’est pas un motif suffisant à ses yeux pour la détacher de la France métropolitaine.

3Quelles conséquences auraient ces revendications ?

La coofficialité de la langue corse ne soulève guère de question parmi les élus corses, rappelait en 2009 le président (PCF) de l’Assemblée de Corse, Dominique Bucchini. À condition qu’elle se fasse « non en concurrence avec la langue de la République, mais en complémentarité avec elle » : « l’avenir de notre langue ne peut se concevoir valablement si, érigée en dogme, elle devient un obstacle au rapprochement des hommes ». Il en est autrement du statut de résident : en affichant officiellement l’objectif d’enrayer la spéculation, les nationalistes en font l’apanage des seuls « continentaux ». Ira-t-il jusqu’à donner à la collectivité unique le pouvoir d’exproprier, comme en menaçait durant la campagne le mouvement Corsica Libera ? Sans action sur le logement social, ce statut n’est pas la réponse à la montée des prix. De même, la « corsisation des emplois », réponse nationaliste – non abandonnée – au fort taux de chômage, que d’aucuns voient comme une « préférence régionale » (à compétences « suffisantes », préférer le Corse), n’accentuera-t-elle pas la concurrence entre travailleurs, redoute le communiste Michel Stefani ? Quant à l’autonomie revendiquée par Jean-Guy Talamoni, en matière fiscale (diminution de la moitié de la CSG, baisse des charges pour les entreprises, crédit d’impôt pour l’investissement, taxe sur les résidences secondaires et pour accéder aux sites touristiques), elle ne placerait pas la Corse sur la liste des paradis fiscaux, mais casserait l’égalité devant l’impôt. Et ouvrirait sans doute un front de négociations avec d’autres « peuples », Bretons, Catalans ou Basques, qui pourraient revendiquer la pareille.

4Macron peut-il inclure la Corse dans sa réforme ?

L’annonce par la ministre Jacqueline Gourault, le 5 janvier, de l’inclusion du dossier corse dans la prochaine révision constitutionnelle générale voulue par le chef de l’État était-elle prématurée ? Le candidat Macron, en pleine campagne, brossait les électeurs nationalistes dans le sens du poil en estimant que « la République est suffisamment forte pour accueillir des particularités en son sein », évoquant la « possibilité de réviser » la Constitution. Mais réunir les trois cinquièmes du Parlement pour réduire le nombre d’élus est une chose, convaincre la droite, forte à l’Assemblée, majoritaire au Sénat, en est une autre. Le président de la Haute Assemblée, Gérard Larcher, a déjà exprimé son refus à Gilles Simeoni, venu le voir début janvier. Hier, c’est le leader des « Républicains », Laurent Wauquiez, qui sur France 2 traçait sa « ligne rouge » : « la Corse est et restera française, il n’y a pas de citoyenneté corse ». Si la droite garde cette ligne, il y a fort à parier que le chef de l’État n’inscrira pas la question dans sa réforme constitutionnelle.

Un hommage à la république intransigeante avec la terreur

L’assassinat du préfet érignac « ne se justifie pas, ne se plaide pas, ne s’explique pas ». Lors de la cérémonie d’hommage au préfet Erignac, assassiné il y a vingt ans, le ton du président de la République était assez ferme. Assez pour condamner tout espoir d’une amnistie des prisonniers « politiques » réclamée par l’exécutif corse. « La justice a été rendue et sera suivie sans complaisance, sans oubli, sans amnistie », a déclaré Emmanuel Macron, sous les applaudissements. S’il appelle de ses vœux au « dialogue renouvelé, refondé, assaini », c’est dans ce cadre. Plus tôt, Dominique érignac, la veuve du préfet, « le premier à tomber en temps de paix », insistait Macron, avait souligné qu’ « à travers lui c’est la République que l’on a voulu toucher et abattre ». « La République n’oublie pas, n’oubliera jamais ce qui s’est passé », a-t-elle martelé. Puis, à l’adresse des nationalistes qui réclament « une cérémonie en l’honneur de tous ceux qui ont perdu la vie dans un long conflit aujourd’hui terminé », elle ajoutait que « la page n’est pas tournée. Comment pourrait-elle l’être alors que la page est tachée de sang ? ». Et, citant le mémorial de la Shoah : « Oublier un crime est un crime. »

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6 février 2018 2 06 /02 /février /2018 17:52
Jean-Pierre Santini est avec Dylan Champeau et 23 autres personnes.

LE PATRONAT CORSE EST À LA FÊTE !

Le patronat corse s'organise comme il ne l'a jamais fait. Après avoir pris le contrôle des transports maritimes à son profit ( le coût du fret a diminué de 20%), il envisage désormais d'acheter l'unique quotidien local. Le contrôle idéologique de l'opinion sera ainsi assuré. Parallèlement à cette montée en puissance des maîtres locaux de l'économie, les autonomistes sont devenus majoritaires dans les institutions politiques. Tout est donc en place pour permettre à la bourgeoisie locale de faire grossir sa boutique. On est loin de la lutte de libération nationale et de la lutte de libération sociale.

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6 février 2018 2 06 /02 /février /2018 17:30
Mirages 2000, chars Leclerc, canons Caesar : la France fournisseuse officielle du carnage yéménite

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Depuis mars 2015, une coalition d’États arabes emmenés par l’Arabie Saoudite conduit une campagne militaire particulièrement meurtrière au Yémen. Les combats s’enlisent, marqués par de potentiels crimes de guerre et par une catastrophe humanitaire sans précédent. Tandis que plusieurs États ont décidé d’arrêter de fournir des armes aux belligérants, la France, « patrie des droits de l’homme » semble indifférente à la controverse, se réjouit même de ses ventes d’armes « record » et de leurs performances en matière de destruction.

Les industriels français de la défense sont fiers des performances de leur matériel. Rien de tel qu’une campagne militaire meurtrière pour en démontrer les qualités ! « Pour ce qui est des chars Leclerc, je vous confirme que leur implication au Yémen a fortement impressionné les militaires de la région », se réjouissait, il y a un an, Stéphane Mayer, PDG du groupe Nexter qui fabrique ces blindés, devant la commission de la Défense de l’Assemblée nationale. Depuis le printemps 2015, 70 à 80 chars Leclerc ont été déployés par l’armée émiratie, alliée de l’Arabie Saoudite, sur le champ de bataille yéménite afin de combattre la rébellion des Houthis.

Même satisfaction chez Dassault, qui fournit des Mirages 2000-9 à cette même armée des Émirats Arabes Unis, et vient de signer un contrat de modernisation de leur flotte : « L’excellence de l’avion et le succès du programme ont été démontrés avec brio par la grande disponibilité du Mirage 2000-9 et la qualité de sa participation à des opérations menées en coalition internationale », annonce fièrement un communiqué du groupe français. Les opérations en question ? Les frappes aériennes de la coalition arabe au Yémen dont certaines, selon l’ONU et des organisations non-gouvernementales, pourraient constituer des crimes de guerre.

« Horreur permanente », selon l’Onu

Quelle est aujourd’hui la situation du Yémen, vitrine de ce savoir-faire français ? Après plus de 30 000 bombardements et un blocus qui entrave l’accès humanitaire, le bilan de cette guerre lointaine est d’au moins 10 000 morts et près de 3 millions de déplacés. L’Unicef estime qu’un enfant y meurt toutes les dix minutes, qu’1,8 million d’entre-eux souffrent de malnutrition aigüe, et que près de 400 000 enfants yéménites sont atteints de malnutrition sévère et luttent pour survivre. Sans parler de l’épidémie de choléra, un désastre dans un pays dont le système de santé est exsangue et où les organisations humanitaires sont elles aussi victimes des bombardements. Plusieurs hôpitaux de Médecins sans frontières (MSF) ont ainsi été visés.

Le Yémen traverse peut-être actuellement « la pire crise humanitaire depuis la fin de la Seconde guerre mondiale », alertent les Nations-unies, dont plusieurs responsables qualifient la guerre d’« absurde et futile », tandis que le haut-commissaire aux droits de l’homme de l’Onu, Zeid Ra’ad Zeid Al-Hussein, parle d’« horreur permanente ». Le 21 décembre 2017, alors que l’un des pays les plus pauvres du monde subit des bombardements depuis mille jours, plusieurs ONG lancent la campagne « Yemen can’t Wait » : le Yémen ne peut pas attendre. Une situation si dramatique que certains pays commencent à trouver gênant de continuer à fournir des armes aux belligérants qui s’acharnent.

Un mouvement de désengagement ignoré par la France

Dès mars 2016, le parlement hollandais vote ainsi une résolution interdisant l’exportation d’armes vers l’Arabie Saoudite, en lien avec son intervention au Yémen. Mi janvier, c’est l’Allemagne, qui a été ces dernières années l’un des gros exportateurs d’armes vers les pays de la coalition qui fait la guerre au Yémen, qui annonce l’arrêt immédiat des ventes d’armes à toutes les parties du conflit. Une décision favorisée par les sociaux-démocrates du SPD, dans le cadre des négociations pour former une nouvelle coalition gouvernementale.

Face au risque que les armes soient utilisées contre des civils, la Norvège, la Belgique et le Canada gèlent également des exportations vers les Émirats Arabes Unis ou vers l’Arabie saoudite. En Finlande, tous les candidats à la présidentielle de février 2018 se sont engagés à arrêter les ventes d’armes aux émiratis, après que des images aient prouvé leur utilisation dans la guerre au Yémen. Quand les gouvernements ne bougent pas, c’est la société civile qui prend le relai : des plaintes sont en cours au Royaume-Uni, en Wallonie et au Canada contre des contrats d’exportation militaires dans la région.

La France, impassible, semble épargnée par ce mouvement. « A ce jour, nous n’avons pas d’information sur le fait que la France aurait revu sa position sur les exportations d’armes », déplore Aymeric Elluin, chargé de plaidoyer « armes et justice internationale » pour Amnesty France. Aucune vente d’arme à l’étranger ne peut pourtant avoir lieu sans l’autorisation du gouvernement. La France est par ailleurs signataire d’un Traité sur le commerce des armes (TCA), et a adopté une Position commune de l’Union européenne (UE) sur les exportations de matériel militaire. Ces règlementation interdiraient a priori tout transfert d’armes vers les parties du conflit yéménite, compte tenu des graves violations du droit humanitaire qui y sont constatées.

Plus d’un milliard d’euros d’équipement pour les saoudiens

Pire : depuis le second semestre de l’année 2014, la France a accordé pas moins de 1989 licences d’exportation de matériel militaire aux différents pays engagés dans la coalition menée par Riyad ! Depuis 2007, l’Arabie Saoudite, le Qatar et l’Égypte sont les trois principaux clients de la France après l’Inde. Sur la seule année 2016, plus d’un milliard d’euros d’équipement militaire a été livré à l’Arabie Saoudite [1].

Dès lors, il n’est pas étonnant de retrouver des armes françaises sur le champ de bataille yéménite : des corvettes Baynunah du constructeur français CMN (Constructions mécaniques de Normandie) pour assurer le blocus, des canons Caesar pour pilonner le Yémen depuis sa frontière… Pour l’Observatoire des armements, la coalition profite ainsi d’un matériel français « dernier cri ».

L’exécutif français ne dit (presque) jamais non

C’est le Premier ministre après avis de la Commission interministérielle pour l’étude des exportations de matériels de guerre (CIEEMG), qui décide ou non d’autoriser les ventes d’armes à l’étranger. Avec des représentants des ministères de la Défense, de l’Économie et des Affaires étrangères, la CIEEMG est un organe purement exécutif : le Parlement ou la société civile en sont exclus.

De surcroît, son fonctionnement est opaque : il ne prévoit aucune transparence sur les motivations des décisions, ni sur leur conformité aux traités internationaux. Seul élément d’information officiel : le Rapport annuel sur les ventes d’armes du pays, transmis au Parlement. Il indique par exemple qu’en 2016, alors que Manuel Valls puis Bernard Cazeneuve occupaient Matignon, seules 48 demandes de licences d’exportation de matériel militaire ont été rejetées sur la base de la Position commune de l’UE. Tandis que 4454 licences étaient accordées. Soit un taux d’approbation de près de 99 %...

Des bénéfices pour les entreprises et les pays acheteurs

Pourquoi un tel enthousiasme des politiques à approuver des exportations d’armes vers d’autres pays, quels qu’ils soient ? Le système militaro-industriel français s’est construit sur la dépendance aux exportations : les entreprises d’armement ont besoin de vendre pour être rentables. Et elles peuvent compter sur l’État pour les soutenir.

Cette rentabilité est en effet largement subventionnée, que ce soit par des avances financières, des garanties publiques à l’exportation, ou l’emploi des fonctionnaires de la Direction générale de l’armement et des attachés de défense pour promouvoir les armes françaises à l’étranger. Sans compter l’engagement des ressources de l’armée française, amenée à participer aux salons d’armement, aux démonstrations de matériel, et à former les personnels étrangers : des dépenses qui s’élèvent à des dizaines de millions d’euros par an, pour booster les ventes des industriels.

Pour gagner des contrats, les fabricants d’armes concèdent des compensations ou « offsets » à l’État acheteur, c’est-à-dire des réinvestissements dans l’économie locale et des transferts de technologies. Dans le cas du contrat sur l’achat de Rafales, l’Inde a obtenu un niveau de compensation de 50 %, ce qui signifie que plus de 3 milliards d’euros seront investis dans l’économie indienne sur les 7,87 milliards du contrat. Une aubaine pour l’économie et les emplois… dans le pays acheteur. « Le contrat des sous marins en Australie va probablement créer plus d’emplois en Australie qu’en France », confirme Aymeric Elluin, d’Amnesty France.

La prolifération, « effet boomerang » de la stratégie française

Outre la délocalisation des emplois, les concessions octroyées aux pays clients, et notamment les transferts de technologies, leur permettent à terme de créer leur propre industrie militaire. Ainsi, grâce au savoir-faire acquis avec la production des hélicoptères d’Aérospatial (aujourd’hui Airbus) dans les années 80, la Chine fabrique désormais ses propres hélicoptères militaires, qu’elle exporte au Cambodge, au Pakistan, en Namibie ou encore en Zambie. En mai 2017, l’Arabie Saoudite annonçait la création de sa propre entreprise d’armements, la Saudi Arabian Military Industries (SAMI).

Les exportations d’armes de la France contribuent donc à la prolifération des capacités de production dans le monde, y compris chez des concurrents et peut-être même à destination d’adversaires potentiels ou d’États peu scrupuleux. Pas de quoi refroidir le gouvernement, qui continue à faire la promotion des industriels français de la Défense, du Qatar à la Turquie, sans faire beaucoup de cas de ses engagements en matière de droits humains. Le Yémen est sans doute loin d’être le seul terrain où des civils sont ou seront victimes des technologies françaises.

Un contrôle démocratique plus que jamais nécessaire

Certains écrits commencent à questionner cette stratégie de la course aux exportations. L’industrie de la défense française serait de plus en plus dépendante des exportations [2]. Par ricochet, le budget de l’État peut aussi être affecté. Ainsi, l’équilibre financier de la Loi de programmation militaire 2014-2019 était-il lié à la vente des Rafales de Dassault à l’étranger, puisqu’en cas d’échec, le gouvernement s’était engagé à couvrir les surcoûts de production de l’avionneur. Pour préserver les finances publiques, il faut vendre à tout prix. Y compris à l’Égypte, malgré la décision de l’Union européenne de suspendre les ventes d’armes au régime dictatorial du maréchal al-Sissi.

Pourtant, ces contrats qui se chiffrent en milliards d’euros restent largement présentées comme des succès commerciaux, et la France comme une « championne des exportations » qui « talonne la Russie ». « En France, il n’y a pas de culture de contestation ou de débat sur la question des exportations d’armes, comme en Grande Bretagne, en Allemagne ou en Belgique, relève Aymeric Elluin. C’est consubstantiel à la cinquième République. »

Alors qu’au Royaume-Uni, il existe une Commission parlementaire dédiée au contrôle des exportations d’armes, le débat en France se limite essentiellement à quelques questions écrites et un rapport annuel qui est transmis aux députés sans plus de discussions. « Il faudrait qu’il y ait des contre-rapports, des questions sur l’utilisation des armes à l’étranger, des garanties contre les violations des droits humains : c’est un enjeu pour les générations futures », conclut Aymeric Elluin. D’ici là, le Yémen attendra.

Anne-Sophie Simpere

Photo : un canon Caesar déployé en Afghanistan

- Lire aussi notre entretien avec l’économiste Claude Serfati, qui montre à quel point l’armée et les industries militaires sont « chez elles » dans les institutions et l’économie politique de la Vème République.

Notes

[1Source : Rapport aux parlementaires sur les ventes d’armes 2017.

[2L’industrie de défense française était en 2012 dépendante des exportations à hauteur de 20% de son chiffre d’affaires. Récemment, le PDG de la Direction des constructions navales (aujourd’hui Naval group) indiquait que son entreprise était dépendante à 50 % des exportations. Voir Lucie Béraud-Sudreau, « La politique française de soutien aux exportations d’armement : raisons et limites d’un succès », Institut français des relations internationales, juin 2017.

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